20 février 2008

Variations sauvages, d'Hélène Grimaud

Variations sauvages
d'Hélène Grimaud

"Je n'ai aucune nostalgie de l'enfance." Dès les premiers mots, Hélène Grimaud donne le ton de son étonnant récit. L'itinéraire de cette pianiste française de renommée internationale emprunte mille chemins buissonniers ; on la suit, de seuil en seuil, à travers son adolescence prodige, sa rupture avec le milieu parisien, son exil aux Etats-Unis, les doutes et la solitude à New York - jusqu'à cette nuit où son regard croise celui d'Alawa, la louve, d'où viendra la renaissance. Eloge des mains, bestiaire fantastique, contes mystérieux, profils inattendus d'artistes et de musiciens dessinent le fil rouge de ce livre dont l'éclat des facettes forme le portrait unique d'une rebelle absolue. "Variations sauvages" est un hymne vibrant à la musique et à la liberté, un plaidoyer pour la reconnaissance des loups et la sauvegarde de la nature. Un petit traité d'insoumission à l'usage de tous les enfants terribles.

Variations sauvages, Hélène Grimaud, Editions Robert Laffont, 2003, 286 pages

Pour en savoir plus

- Le centre de conservation des loups, fondé par Hélène Grimaud
- Un site la concernant

Un extrait du livre
p66-p68

On s'intéresse de plus en plus aux facultés psy dont certaines personnes sont douées. Ce sixième sens, cette intuition, qui permettrait à certains de pressentir l'avenir, de deviner les pensées d'autrui, de saisir des liens secrets entre la mort et la vie. Est-ce parce que rien n'a perverti leur caractère ? Beaucoup d'animaux ont manifesté les mêmes facultés. Et l'histoire fourmille de ces cas.
Ainsi, Louis XI avait racheté à son maître l'âne Brunot qui prédisait la pluie et le beau temps.
Les poissons rouges de l'empereur du Japon lui signalèrent en 1923, par leur comportement frénétique, puis en se jetant hors de leur bocal, l'imminence d'un séisme.
Les chiens de Hiroshima ont hurlé tous ensemble, à la mort, quelques heures avant l'arrivée des bombardiers.
A Fribourg, le 24 novembre 1944, un canard que les gardiens surveillaient pour l'étrangeté de ses comportements prémonitoires se mit à cancaner furieusement et à tenter, par tous moyens, de s'échapper. Avertie, une bonne partie de la population se mit à courir avec lui, hors de la ville. Trente minutes après leur départ, la pluie de feu des bombardements anéantissait quelque trente mille habitants et le centre de la ville.
En Espagne, malgré les coups de fouet du cocher, un cheval refuse de pénétrer dans un tunnel de montagnes. Derrière l'attelage, les automobilistes klaxonnent frénétiquement. Peine perdue : bien que certains chauffeurs soient descendus de leurs véhicules pour tirer à hue et à dia l'animal récalcitrant vers le bas-côté, le cheval ne bouge pas. Et pour cause : quelques instants plus tard, le tunnel s'écroule.
Six mois avant le déménagement des Halles du centre de la capitale, deux millions de rats, inexplicablement avertis, prennent la direction de Rungis, la nouvelle adresse du ventre de Paris.
Pendant des semaines, le chat de Winston Churchill ne quitte pas le lit où, malade, son maître attend l'amélioration que les médecins lui ont prédite. La guérison est déclarée imminente. Quelques heures plus tard, le chat pousse un miaulement terrible et, bondissant, se met à fuir la chambre. Churchill meurt le lendemain.
Agacé par les gémissements permanents de son caniche Baron, Victor Hugo en fait cadeau à son ami, le marquis de Faletans qui partait en poste à Moscou. Le diplomate adopte le chien et, régulièrement, transmet de ses nouvelles à l'écrivain. Jusqu'au jour où Baron disparaît. Malgré les avis de recherche et les promesses de récompense, personne ne le retrouve. Quelques mois plus tard, Baron, maigre, les pattes en sang, grattait à la Porte du domicile de Victor Hugo. Il avait parcouru quatre mille kilomètres pour retrouver son maître...
Et que dire de Mohilov, le chien du duc d'Enghien, qu'il faut entraîner de force loin de son maître emmené, pour y être exécuté, dans les fossés de Vincennes ? Dès qu'il est relâché, le chien court à perdre haleine, trouve seul le chemin du cimetière et, en gémissant, il se couche sur la tombe du duc. Sans doute y serait-il mort si un ami du duc d'Enghien n'avait stipulé, par voie testamentaire, qu'on prenne le plus grand soin de son fidèle, du plus fidèle de ses compagnons...






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