28 janvier 2013

Bons baisers des bonobos, de Vanessa Woods

Bons baisers des bonobos
Les aventures d'une primatologue au Congo
de Vanessa Woods

Imaginez un de vos cousins qui, en guise de bonjour, tend le sexe à la place de la main, organise des parties fines avec les voisins et laisse aux femmes la gestion des affaires du monde. Ce cousin n'est pas tout seul, il y en a toute une tribu : celle des bonobos, les primates les plus menacés et les plus affectueux qui soient. Une espèce aussi proche du chimpanzé par les gènes qu'éloignée de lui par les moeurs, et qui partage 98,7% de notre ADN. Mais d'eux on sait fort peu de chose.

L'été 2005, Vanessa Woods pose ses bagages dans un Congo dévasté par la guerre. Son fiancé, le primatologue Brian Hare, l'a parachutée dans un sanctuaire de bonobos, persuadé qu'il trouvera chez eux la réponse à la question qui l'obsède : en quoi consiste notre humanité ?

Vanessa et Brian vont vivre au milieu de ces primates pas comme les autres, les observer : pourquoi les bonobos sont-ils enclins à coopérer ? Pourquoi ont-ils recours au sexe pour atténuer leurs angoisses et régler leurs conflits quand les chimpanzés forment des sociétés dominées par les mâles, où la contrainte sexuelle, l'infanticide et les razzias sont monnaie courante ? Pourquoi un bébé bonobo hurle-t-il de terreur devant un hérisson en plastique rouge quand un bébé chimpanzé se l'approprie dare-dare ?

Il se trouve que les bonobos boudent les tests sauf s'ils sont menés par une femme... Et l'on assiste à la naissance d'une vocation : peu à peu, Vanessa la dilettante se mue en chercheuse passionnée. D'une plume espiègle et gouailleuse, elle nous raconte les amours d'Isiro "la danseuse" et de Mikeno "le penseur", les frotti-frotta de deux femelles qu'excite l'odeur de pomme verte, la dinguerie de Kikongo, qui secoue la tête à s'en décrocher le cerveau comme le batteur du Muppet Show, bondit en l'air, pieds joints, comme Gene Kelly, ou encore la mort déchirante du petit Bolombe. Et nous découvrons que. dans ce pays meurtri, l'homme et l'animal ont en commun un courage et une volonté de survivre extraordinaires.

Bons baisers des bonobos, Vanessa Woods, Traduction : Laurence Decréau, Editions Flammarion, 2011, 355 pages, avec plusieurs photos en couleurs

A propos de l'auteur

Vanessa Woods est chercheuse en primatologie à l'université Duke (Etats-Unis), membre du Groupe de recherche en psychologie des hominoïdés (Institut Max-Planck). Elle est également journaliste pour Discovery Channel, et a publié des articles dans BBC Wildlife, New Scientist, Travel Africa. En 2003, elle a remporté l'Australasian Science Award for Journalism.

Pour en savoir plus

- Le site des Editions Flammarion
- Le site officiel de Vanessa Woods
- Sa page Youtube (nombreuses vidéos)
- Le documentaire Bonobos, réalisé par Alain Tixier
- Une tendresse sauvage, de Claudine André
- Lola ya bonobo, de Claudine André et Christine d'Hauthuille
- Bonobos : Le bonheur d'être singe, de Frans de Waal et Frans Lanting
- Le singe en nous, de Frans de Waal
- La maison des singes, de Sara Gruen

L'avis d'un lecteur
Source

Cherchez l'erreur

Une journaliste de trente ans raconte comment sa rencontre avec les bonobos a fait évoluer son regard sur le monde.

On peut trouver plusieurs bonnes raisons pour se lancer dans un livre, mais si ce qui vous intéresse avant tout est le style ou la façon dont l'auteur structure son récit, ne comptez pas sur Vanessa Woods, qui écrit plus ou moins comme ça lui vient, sautant du coq à l'âne, avec de temps en temps des blagues dignes d'une série télévisée. Il n'y a pas non plus énormément d'émotion, ni de suspense. Au bout du compte, si ce livre mérite l'attention, c'est surtout parce qu'il parvient à troubler notre vision de l'humanité. On a beau respecter les animaux, les insectes, les plantes et le vivant en général, nous, hommes, dominons à ce point le monde que nous ne pensons pas plus à notre supériorité qu'à l'action de respirer. Or, ce sont cette certitude et les droits qui en découlent, que ce livre ébranle.

Bonobos, chimpanzés et humains, qui ont un ancêtre commun, partagent plus de 98% de leur patrimoine génétique. Curieusement, les bonobos, présents uniquement au Congo, demeurent moins étudiés que les chimpanzés, alors qu'ils diffèrent radicalement, notamment dans les rapports sociaux : par exemple, un chimpanzé mis en présence d'un étranger tentera de le mettre en pièces, tandis qu'un bonobo ira plutôt lui caresser les organes génitaux, ce qui est quand même plus sympathique. Manque de bol, il semble que nous soyons plus chimpanzés que bonobos, hippies mis à part, alors comme d'habitude, ce sont les plus gentils qui prennent, et au sanctuaire Lola Ya Bonobo, on recueille de petits singes orphelins (leur maman tuée et mangée par des braconniers), aux doigts mutilés (à cause de leurs fameuses propriétés magiques), bref, complètement traumatisés.

Très instructif, agrémenté de plusieurs photographies, le livre de Vanessa Woods aborde aussi l'histoire du Congo, des guerres civiles, avec ses horreurs habituelles, d'une violence à vomir, mais surtout il nous parle de l'humanité des bonobos, d'autant plus évidente qu'elle côtoie la sauvagerie de leurs cousins.



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