Mise à jour : Ajout du sommaire et des extraits
Décembre 1984. Alors qu’elle est alitée depuis de nombreuses semaines à l’hôpital après l’accident qui lui a coûté ses deux jambes - elle a tout juste 17 ans -, Noa Bercovitch est en pleine rébellion et n’exprime que sa rage. Sa seule distraction, dans sa chambre blanche et vide, est la visite d’un rouge-gorge qui vient non pas picorer des miettes sur le rebord de la fenêtre mais simplement la regarder, elle, de derrière la vitre givrée. Et sept jours durant, il reviendra…
Bien des années plus tard, Robert Laffont, ému par la lecture de "Oline, le dauphin du miracle", propose à Noa Bercovitch de réfléchir à un sujet, pour sa collection "Aider la Vie". Un livre sur les animaux, les rapports d’amitié et d’amour qu’ils entretiennent avec l’homme et l’aide qu’ils peuvent apporter à celui-ci. Ce jour-là, le rouge-gorge est réapparu dans sa mémoire et avec ce souvenir ont coulé toutes les larmes qu’elle avait ravalées à l’époque. Une porte s’est ouverte et aussi l’envie de découvrir une autre dimension d’elle-même.
Au long de cette promenade, qui lui a fait parcourir la planète à la recherche d’histoires d’animaux, à la recherche de "notre" histoire avec les animaux, depuis l’époque où les magdaléniens les ont dessinés au fond des grottes jusqu’à aujourd’hui, Noa Bercovitch a non seulement rencontré des animaux au destin étonnant, mais elle a aussi pu faire le point sur nos connaissances et nos lacunes scientifiques. Que sait-on en effet de l’intelligence pratique ou émotionnelle de telle ou telle espèce, comment aborder, si ce n’est expliquer, tous leurs mystères ? Mais surtout, ces rencontres étonnantes nous démontrent que, entre l’animal et nous, c’est avant tout une histoire d’amour.
A travers 60 récits palpitants, un voyage aux quatre coins de la planète et au cœur de notre Histoire, pour découvrir les relations énigmatiques qui nous unissent, hommes et bêtes.
L'arche de Noa, Noa Bercovitch, Editions Pocket, 2003, 320 pagesUn mot de l'auteurExtrait du premier chapitreP15-P17 ../.. A la recherche de notre histoire avec l'animal - depuis l'époque où les Magdaléniens les dessinaient au fond des grottes jusqu'à nos jours - j'ai cherché à comprendre en quoi il peut aider l'homme et comment notre relation s'articule autour de cet échange, empreint d'hésitation et de fougue.
Si la science s'intéresse à présent de plus près aux comportements animaliers, elle se heurte toutefois à de fascinantes énigmes. Quelle faculté permet à des chats, des chiens, des oiseaux, des tortues entre autres, de parcourir d'incroyables distances pour revenir chez eux ? Pourquoi certains chiens peuvent-ils prévoir les crises d'épilepsie de leur maître ? Comment expliquer qu'ils puissent détecter chez les hommes des maladies graves ? Comment savent-ils, à distance, ce que les autres font ? Comment pressentent-ils les catastrophes et les accidents ? Pourquoi cherchent-ils si souvent à protéger les hommes à tout prix ? Les scientifiques se posent encore ces questions.
Animal complice, lien privilégié au monde sauvage, modèle, miroir, tuteur, protecteur, sauveur, martyr, professeur et guide... son visage tourné vers l'homme est multiple.
J'ai rencontré au cours de ce voyage des héros, des martyrs, des guerriers, des amitiés fondatrices et le grand amour. J'en rapporte des fables du quotidien et des témoignages extraordinaires : un cochon qui appelle au secours, des caribous qui jouent au toboggan sur la glace, un âne qui sauve tous les enfants d'un village, un chien qui se sacrifie pour ceux qui l'ont sauvé, des dauphins qui font battre en retraite des requins affamés, un ours qui nourrit un chaton... Vous apprendrez que les chats et les tortues sont attachés à leur propriétaire autant que les chiens qui, avec les dauphins, sont les champions des détections de maladies mortelles. Vous verrez comment les chevaux aident des handicapés, un écureuil guérit un malade, un adolescent égaré trouve son équilibre grâce à un aigle, un rescapé du ghetto de Varsovie s'est transformé en rat pour survivre et comment une autiste célèbre comprend le bétail mieux que personne...
Le peuple de l'Arche est loin d'avoir livré tous ses secrets...
A propos de l'auteurPascale Noa Bercovitch est née à Angers en 1967. En décembre 1984, elle perd ses deux jambes dans un accident de train. Six mois plus tard, elle passe son bac en candidat libre et part en Israël s'engager dans l'armée pour un an et demi. Elle y sera chargée d'instruire les troupes francophones et anglophones dans l'armée régulière. Elle intègre l'équipe nationale de natation et devient championne dans sa catégorie de handicap, tout en poursuivant des études d'histoire du Proche-Orient, de psychologie et d'arabe à Haïfa. Puis elle se tourne vers le journalisme de radio et de presse écrite. Durant la guerre du Golfe, elle est interprète et rencontre Hervé Chabalier et Christine Ockrent, qui lui proposent un poste à Paris. Elle exerce le métier de grand reporter pendant huit ans avant de devenir réalisatrice indépendante et de tourner de nombreux documentaires. En 1997, elle consacre un film à l'étrange amitié qui unit Oline, un dauphin femelle, à Abid'allah, un jeune Bédouin sourd-muet vivant au bord de la mer Rouge. Elle raconte ce conte de fée dans Oline, le dauphin du miracle (1999), avant d'exprimer la fascination qu'elle éprouve pour les dauphins dans Le sourire du dauphin (1999), traduit en dix langues.
Pour en savoir plus- Du même auteur :
Oline, le dauphin du miracle- Un extrait du livre concernant le gorille Koko
sur ce lien- Un extrait du livre concernant le chat Célestin
sur ce lien- La rubrique
Histoires vraiesAu sommaire1. Le rouge-gorge
2. Le lion végétarien
Dans le coeur ou dans l'assiette
3. L'aigle complice
Ils sont devenus nos amis
4. Dans la peau d'une vache
Notre lien privilégié avec la nature
5. Face à face avec la gorille
Des êtres doués d'émotion
6.Traitement de cheval
Des médecins pas comme les autres
7. Un cochon d'ange gardien
Quand ils nous sauvent la vie
8. Le diagnostic du caniche
S'ils étaient l'avenir de l'homme
Epilogue
Remerciements
Bibliographie
Quelques extraits du livreP29
../.. J'avais, petite fille, les mêmes réticences que celles de Lamartine sans avoir jamais mis les pieds dans un abattoir ni même aperçu les coulisses d'une boucherie, mais, comme beaucoup d'enfants, je m'identifiais si facilement à un animal - à un Justin ou à un autre - que l'obligation de finir ma part de steak saignant s'avérait impossible. Ma gourmandise s'arrêtait là où commençait la viande rouge, la plus proche de notre chair, et ma soeur se dévouait pour m'aider à finir ces maudites assiettes. Aujourd'hui encore, ce souvenir est un véritable cauchemar ! Je me revois, me demandant toujours de quel animal il s'agissait. La vue et l'odeur du sang me donnaient l'impression d'avaler ce "quelque chose" qui pouvait ressentir, bouger et crier, tout ce qui constituait l'existence même. Mon sentiment d'enfant me disait donc déjà que l'homme peut difficilement séparer les différents aspects de l'animal : bon plat et ami fidèle, frère et proie. ../..
P147
../.. Une expérience a été effectuée avec des rats, après qu'elle a donné des résultats surprenants auprès de cobayes humains, à l'université de Yale, aux Etats-Unis. Un professeur en blouse blanche demandait aux étudiants d'envoyer un choc électrique douloureux à un jeune homme attaché, pour stimuler prétendument son apprentissage. Il s'agissait, bien évidemment, d'une simulation : les décharges étaient factices et l'étudiant, bon comédien. La plupart des volontaires ont obéi à la requête de celui qui faisait autorité. Ils ne risquaient pourtant aucune sanction s'ils refusaient, et rien ne pouvait les faire douter de la réelle puissance du courant.
Les rats, par contre, ont refusé d'actionner un levier leur délivrant leur ration quotidienne de nourriture si cela devait envoyer, simultanément, un choc électrique à un congénère. Et ce, quitte à jeûner. Voilà qui expliquerait la bonne réputation du Rattus norvegicus dont on conseille la compagnie aux enfants. ../..
P152-P153
../.. On peut penser que certains animaux développent, en tout cas, un certain sens du beau. Les scientifiques qui étudient les éléphants et les dauphins, par exemple, n'ont pas manqué de remarquer leur intérêt pour la musique. Si vous jouez de la guitare ou de l'harmonica autour d'un feu de camp dans la brousse ou sur le pont d'un bateau en pleine mer, vous avez toutes les chances de ne pas rester seul très longtemps. Je l'ai expérimenté moi-même avec Oline et les dauphins du Dolphin Reef à Eilat - quitte à provoquer la stupeur de spectateurs non avertis qui m'ont prise pour une médium !
Jim Nollman, lui, l'a constaté en particulier chez les baleines et les orques. Il parcourt la planète en donnant des concerts de guitare à des singes, des loups et des dauphins ! En 1977, il décide de jouer dans une baie, pour un nouveau public insolite : des orques... Bientôt, les chants des cétacés répondent à ses accords et, à sa stupeur, en totale harmonie. Leurs phrases musicales sont structurées. Les animaux se lancent dans d'incroyables improvisations. En réponse, Nollman tente de les reproduire à son tour sur sa guitare électrique... Un véritable dialogue musical s'instaure. Le musicien n'a jamais entendu une telle créativité. Cela dure des heures et déclenche chez lui un "accès d'amour fou pour la création toute entière". ../..
P276
../.. Aussi surprenant que cela puisse paraître, nombreuses sont les tortues de jardin qui développent cette même sensibilité exacerbée envers les personnes qui leur sont proches. Il en existe qui savent pertinemment le moment où l'on va leur préparer à manger, quelles que soient l'heure et les conditions, comme les trois tortues de la danseuse de flamenco Soli Carrera, près de Madrid. Dès l'instant où leur maîtresse pense à les nourrir, et seulement à ce moment-là, les trois tortues - même si elles sont éloignées les unes des autres de plusieurs centaines de mètres - arrivent à l'endroit du repas. Elles n'approchent qu'à cet instant précis, qui diffère chaque jour. Durant les tournées de leur maîtresse, quand une voisine vient les nourrir, elles attendent par contre autour de la maison. Elles semblent ne plus rien percevoir, à croire qu'elles ne peuvent lire que dans les pensées de Soli et non dans celles des autres. ../..
P296-P297
../.. Un matin, alors que Raphaël [un jeune garçon de 17 ans, épileptique] se trouve à l'école et que Mme R. s'occupe de sa maison, Dor [un golden retriever, premier chien destiné à la détection des crises d'épilepsie en Israël], qui gambade dans le jardin, commence à montrer des signes d'impatience inhabituelle. Il se dirige sans arrêt vers le portail, gratte la poignée comme s'il attendait déjà le retour de son ami, puis entre dans la maison, aboie, tourne en rond. Mme R. ne sait que faire : son fils est à cinq kilomètres de là. Elle décide d'aller le chercher en voiture. Six heures plus tard, Raphaël a une grosse crise d'épilepsie, Dor l'avait prévue... à distance.
Tout le monde est sous le choc. Les éleveurs avaient parlé de l'odorat du chien, pas de magnétisme ou de télépathie... Personne ne sait comment Dor ressent les crises, mais l'évènement se produit régulièrement.
Raphaël ne l'enferme plus dans sa salle de classe, ni à la gym, ni chez le kinésithérapeute : il le laisse tranquillement à la maison d'où il travaille à sa façon. Le "télétravail mode canin". La thérapie à distance est-elle un miracle ? Le dresseur Uri Beckman précise que "quand l'enfant est loin, le chien ne pense à rien d'autre qu'à lui. La distance ne fait qu'accroître sa vigilance".
Le lien qui unit Dor et Raphaël est rare. Que se passe-t-il entre le jeune homme et son animal pour qu'il perçoive, de loin, l'état de santé de son maître et ce, plusieurs heures avant que lui-même ne se doute de quoi que ce soit ? ../..
P302
../.. Dor et son frère Doubi, lui-même chien d'alerte d'un autre enfant épileptique, viennent simultanément de subir une grande transformation qui pourrait nous mettre sur une piste sérieuse.
A l'âge d'un an, Dor et Doubi ont été placés en stage durant un mois chez leur entraîneur Uri Beckman, en vue d'un dressage classique censé améliorer toutes leurs performances. A l'aide d'un bâton qui envoie de faibles décharges électriques d'environ 6 volts (j'ai testé une décharge sur mon bras, elle donne une sensation de picotements désagréables, de "fourmis"), on apprend à Dor et à Doubi à obéir. Désormais, celui qui donne les ordres détient le contrôle, il devient le dominant de la famille, l'alpha.
Le résultat obtenu est contraire à celui que l'on escomptait. Après un mois au chenil, de retour à la maison, ni Dor ni Doubi ne décèlent les crises des enfants. Ils vont très bien mais semblent avoir perdu leur don, momentanément ou définitivement. De l'avis des dresseurs et des neurologues consultés, il est possible qu'ils retrouvent bientôt leurs facultés, mais rien n'est sûr.
Nous avons longuement discuté, Uri Beckman, Jan Nijboer et moi, de cette régression. Les chiens se sont trouvés désinvestis du rôle qu'ils s'étaient assigné. Ils ont perdu en quelque sorte leur sens de la responsabilité. De l'avis de Beckman, la raison principale est physiologique. Les chocs électriques, mêmes minimes, infligés aux chiens auraient "brouillé" leurs sens. Il semblerait donc que Dor et Doubi, particulièrement attachés et attentifs à leur maître, réagissent aux perturbations bioélectriques liées à leurs crises. ../..
Autre extraitSource : Site Naguilah
Un écureuil dans mon café…M. Arwell, ancien pilote de ligne australien, était atteint d’une forme rarissime de cancer. Il subissait régulièrement de lourdes opérations chirurgicales qui lui laissaient de terribles cicatrices et le faisaient moralement souffrir.
«Il te faut un écureuil!» lui ordonna le docteur Adamson qui n’était pas cancérologue mais vétérinaire. La veille, un client lui avait apporté, tombé d’un nid, un minuscule bébé écureuil et il était persuadé que ce petit bout de fourrure à ressort pourrait doper le moral de n’importe quel désespéré.
Kadour arriva chez les Arwell dans une boîte d’allumettes remplie de coton. Une boule de poils grosse comme une noix, à la fourrure un peu grasse, qui buvait du sérum physiologique dans un biberon de poupée! Rapidement, il a appris à se lécher et a commencé à «voler» dans toute la maison, inspectant les lieux du sol au plafond, à la vitesse de la lumière.
Arwell, lui, récupérait à vue d’œil, et les cancérologues ne comprenaient pas comment ses lésions cicatrisaient si bien malgré son âge… Arwell expliqua alors aux médecins sceptiques que ses fous-rires quotidiens, provoqués par les exercices de voltige de Kadour, devaient y être pour quelque chose.
Le matin même, Arwell lisait son journal sur sa terrasse en buvant son café; Kadour, perché comme souvent sur le haut de son crâne, inspectait les environs. Arwell a éternué et quand il a relevé le nez, des yeux effrayants le fixaient. Kadour venait de plonger tête la première dans son café et de prendre un bon «shoot» de caféine. L’animal le regardait maintenant, assis au fond de la tasse, effaré.
Arwell posa son journal et entrepris de sécher son tout petit ami. Il se dit qu’il vivait un moment unique, absolument unique: personne d’autre, aucun homme ce matin-là ne pouvait se vanter d’avoir un écureuil volant dans son café! Kadour se lova sous le col de sa chemise, dans le creux d’une de ses douloureuses cicatrices, à la base du cou, et s’endormit. Ce nouveau présent imposé par Kadour a fait oublier à Arwell les opérations passées et futures. La maladie et la peur passaient au second plan, derrière les petits bonheurs précieux d’un quotidien à ressort…