12 août 2010

Les animaux souffrent-ils ? de Philippe Devienne

Les animaux souffrent-ils ?
de Philippe Devienne


Philippe Devienne, vétérinaire, offre un regard neuf sur l'épineuse question de la souffrance animale, à l'heure où justement la souffrance humaine est de mieux en mieux prise en charge grâce aux progrès techniques. Un petit ouvrage scientifique qui nous ouvre sur le monde et sa réalité.

Comment juger de la souffrance animale ? Qui est à même de le faire ? Le vétérinaire, l’éleveur, l’employé des abattoirs, le chercheur… tout un chacun ? Et sur quels critères, puisque, à l’inverse de l’être humain, l’animal ne peut en parler ?

Les animaux souffrent-ils ? Pourquoi cette question, qui suscita de houleux débats au XVIIe siècle, mérite-t-elle à nouveau d'être posée ? Nous sommes à peu près tous convaincus qu'un chien souffre... mais une mouche a-t-elle mal ? Science et philosophie ont-elles définitivement clos le sujet de la douleur animale ? Et si la réponse était à chercher hors de leurs sentiers battus ?

Les animaux souffrent-ils ?, Philippe Devienne, Editions Le Pommier, 2008, 64 pages

A propos de l'auteur

Vétérinaire, Philippe Devienne est également titulaire d’un doctorat de philosophie.

Voir aussi, du même auteur : Penser l'animal autrement.

Au sommaire

- Introduction
- Une question de définitions ?
- Comment sait-on qu’ils souffrent ?
- Peut-on croire qu’ils souffrent ?
- Conclusion
- Références
- Bibliographie

L'analyse du livre
par la LFDA, La Fondation Droit Animal

Un nouvel ouvrage à mettre au crédit de cette remarquable collection. Docteur vétérinaire et philosophe, l’auteur montre combien est dépassée la conception postcartésienne, développée par Nicolas de Malebranche, qui voulait voir dans les animaux des objets dépourvus de douleur, comme les automates ou les horloges. Mais il affirme que l’analyse physiologique, qui montre l’existence chez les animaux de processus identiques à ce qu’on trouve chez les humains, ne peut permettre d’affirmer, puisque les animaux ne parlent pas, que leur vécu de la douleur ou de la souffrance est vraiment identique au nôtre. Et à l’opposé de cette analyse «objective» des mécanismes physiologiques, l’interprétation «anthropomorphique» subjective des douleurs des animaux, comme identiques aux nôtres, se heurte à la critique que ce peut être une fiction de notre imagination. En d’autre termes, l’analyse des mécanismes physiologiques donne une idée objective de ces mécanismes, mais sans conclusion possible quant la «totalité sentante» et quant à ce qu’elle ressent effectivement, alors que l’approche subjective donne certes une idée de la totalité, mais sans preuve objective de sa véracité, puisque l’animal ne peut témoigner de son ressenti. «Même chez un être humain, je ne peux pas ressentir la sensation d’autrui» (p52).

Face à ce qui apparaît comme une question définitivement sans réponse, l’auteur conclut, de manière relativement empirique, en s’appuyant sur la théorie du langage du philosophe Wittgenstein, que nous pouvons concevoir la douleur de l’animal puisqu’elle est ainsi inscrite dans nos catégories langagières : «C’est un animal ou un humain qui a mal, et cela ne découle pas d’une réalité empirique mais réside dans notre façon de parler» (p57). Ainsi s’offre, pratiquement, la possibilité de sonder empiriquement la douleur, et de la soulager par diverses techniques, des méthodes pratiques dont l’auteur, fort de sa pratique vétérinaire, nous donne, pour les animaux les plus familiers, des «recettes» nombreuses (et utiles). Notamment, face au relatif «silence» de l’animal qui souffre : «quel vétérinaire n’a jamais été surpris de découvrir des lésions tissulaires étendues (…) en complet décalage avec la discrétion du comportement douloureux de l’animal» (p25). Finalement, sans pouvoir répondre à la question métaphysique de la douleur animale et de son vécu réel, «occupons nous d’être vigilants et attentifs à propos de nos animaux… pour détecter chez eux les premiers signes de leur souffrance» (p60). Une souffrance qui nous apparaît spontanément à travers notre univers langagier usuel. Nous avouons ne pas être tout à fait d’accord avec l’auteur. Certes nous le suivons parfaitement dans sa démarche pratique visant à limiter au mieux la douleur des animaux.

Mais nous pensons aussi qu’on peut aller plus loin dans l’affirmation philosophique des capacités de animaux à ressentir la douleur, en s’appuyant sur les mécanismes physiologiques (objectifs) et en inférant, dans le même temps, à leur propos un ressemblance (subjective, mais assez plausible) avec leurs conséquences ressenties chez l’homme. Cela donne une «probabilité de ressenti de la douleur» assez comparable, pour les mêmes mécanismes, entre eux et nous. A défaut, quand on s’éloigne trop des comparaisons possibles avec les humains (adultes), il faut donner aux animaux (et aussi aux jeunes enfants dépourvus, eux-aussi, du langage) le «bénéfice du doute» et supposer qu’ils souffrent, plutôt que de supposer qu’ils ne souffrent pas. Ainsi pourra-t-on progresser vers davantage de morale dans un monde qui en a bien besoin. En attendant sans doute des progrès ultérieurs de l’imagerie cérébrale, qui pourront peut-être permettre d’aborder, plus directement, dans le futur, le vécu de l’expérience douloureuse.

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1 commentaire:

Anonyme a dit…

Il faut d'URGENCE poursuivre toutes les recherches qui pourraient rendre indiscutable la souffrance des animaux, des BOVINS et OVINS, mammifères comme nous, qui pâtissent actuellement des abattages rituels sans étourdissement,en quantité industrielle exponentielle (? +50 % en RP),sans précédent, avec la complicité d'acteurs des chaînes de vente de viande pour profits économiques, en dépit de notre règlementation rendant obligatoire l'insensibilisation avant
égorgement;dans l'irrespect total de la Déclaration Universelle des Droits de l'Animal. Rien, aucun verset dans le Coran, notamment, n'interdit l'étourdissement. Pourquoi accepter ces rituels cruels et laisser faire contre notre conscience et volonté ? Valable pour porcs et autres animaux de boucherie. MERCI.