22 février 2016

(Up) Vegan, pour un monde meilleur

Cette page est une sélection de vidéos et textes sur le végétalisme,
à la mémoire de tous les animaux morts sans avoir vécu.

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Etre vegan est plus qu'un régime alimentaire.
C'est aussi plus qu'un style de vie.
C'est un chemin vers une révolution.
Contre la honte que l'humanité est devenue.
C'est un chemin pour faire de ce monde un meilleur endroit.

Antoine Jouanneau
(extrait de la vidéo ci-dessous : Veni Vidi Vegani)


Un entretien avec Jérôme Bernard-Pellet, médecin généraliste végétalien,
membre de l'APSARes,
Association de Professionnels de Santé pour une Alimentation Responsable.

Un autre entretien est disponible ici : 1ère partie - 2ème partie


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Animals should be off the menu - Philip Wollen
Une vidéo découverte grâce à V3nom.
Cliquez sur son pseudo pour voir ses excellentes autres vidéos.


Extraits du discours de Philip Wollen

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Les animaux doivent être retirés du menu - parce que ce soir,
ils crient de terreur, dans les abattoirs, les caisses et les cages.
Vils goulags ignobles de désespoir.

J’ai entendu les cris de mon père mourant,
son corps ravagé par le cancer qui l’a tué,
et je me suis rendu compte que j’avais déjà entendu ces cris avant.
Dans les abattoirs…
les yeux arrachés et les tendons coupés,
sur les navires bétaillers en direction du Moyen-Orient
et chez la mère baleine mourante
quand un harpon explose dans son cerveau
alors qu’elle appelle son baleineau.
Leurs cris étaient ceux de mon père.
Et j’ai découvert que dans la souffrance, nous sommes tous égaux.
Et dans leur capacité à souffrir,
un chien est un cochon, est un ours... est un garçon.
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Seulement 100 milliards de personnes ont vécu sur terre. 7 milliards y vivent aujourd'hui.
Et nous torturons et tuons 2 MILLIARDS d'animaux chaque semaine.
10.000 espèces sont anéanties chaque année par les actions d'une seule.
Nous sommes maintenant face à la 6ème extinction de masse de l’histoire cosmologique.
Si un autre organisme agissait comme ça, les biologistes l’appelleraient - un virus.
C’est un crime contre l'humanité aux proportions inimaginables.
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Il y a plus de 600 MILLIONS de végétariens dans le monde.
C'est plus grand que les Etats-Unis, l’Angleterre, la France, l’Allemagne, l’Espagne,
l’Italie, le Canada, l’Australie et la Nouvelle Zélande réunis !
Si nous étions une nation,
nous serions plus grand que les 27 pays de l'Union Européenne !
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Si tout le monde mangeait un régime alimentaire occidental,
nous aurions besoin de 2 planètes Terre pour les nourrir.
Nous n’en avons qu'une seule et elle est en train de mourir.
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Chaque morceau de viande que nous mangeons
est une gifle au visage baigné de larmes d'un enfant affamé.
Quand je le regarde dans les yeux, dois-je rester silencieux ?
La terre peut produire assez pour les besoins de chacun,
mais pas assez pour la cupidité de tous.
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Les animaux ne sont pas seulement d’autres espèces,
ils sont d'autres nations.
Et nous les assassinons à nos risques et périls.
La carte de la paix se dessine sur un menu.
La paix n'est pas seulement l'absence de guerre.
C'est la présence de justice.

La justice doit être aveugle face à la race, la couleur, la religion ou l’espèce.
Si elle n'est pas aveugle, elle sera une arme de terreur.
Et il y a une terreur inimaginable dans ces horribles Guantánamo
que nous appelons "élevages industriels" ou "abattoirs".
Si les abattoirs avaient des murs de verre, ce débat n’aurait pas lieu.

Je crois qu'un autre monde est possible.
Par une nuit tranquille, je peux l'entendre respirer.
Retirons les animaux du menu et de ces chambres de torture.
S'il vous plaît, votez ce soir pour ceux qui n'ont pas de voix.

Merci.

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Marche pour la fermeture des abattoirs - 2 juin 2012

Version courte


Version longue


Marche pour la fermeture des abattoirs - 15 juin 2013


Des extraits d'un texte lu lors de cette marche.
Cliquez sur ce lien pour lire l'ensemble des textes.

Nous sommes rassemblés aujourd’hui sur le site symbolique
des anciens abattoirs de Vaugirard.

Ici même, en 1949, le cinéaste Georges Franju
a filmé la triste réalité de leur mise à mort
dans un documentaire intitulé « Le Sang des Bêtes ».
De sa première visite il dira plus tard :

« Quand je suis allé la première fois là dedans,
je suis rentré chez moi,
j'ai pleuré pendant deux jours,
j'ai caché tous les couteaux,
j'avais envie de mourir. »

Les consommateurs de chair, de lait ou d'oeufs
que nous sommes, ou que nous avons été,
n’aiment pas penser à ce qui s’est passé en amont
pour que ces produits arrivent dans nos assiettes.

Mais pendant que nous détournons le regard,
les animaux, eux, continuent à vivre l’enfer, à cause de nous.

Il est temps de déconstruire l’idéologie carniste
qui sécrète depuis des siècles ces arguments criminels,
et qui est aujourd’hui savamment entretenue
par les industries d’exploitation animale.

Nulle pratique humaine ne cause plus de souffrance et de morts
que l'élevage et la pêche.

Chaque année dans le monde,
plus de 60 MILLIARDS d'animaux terrestres sont abattus pour leur chair
auxquels viennent s'ajouter des centaines de milliards d’animaux
issus des élevages aquacoles,
et des centaines de milliards de poissons arrachés aux lacs, rivières et océans.

Quelle justification éthique pouvons nous trouver à tous ces meurtres alimentaires ?
A ces gorges tranchées, ces poissons asphyxiés ?
Aucune, si ce n'est le plaisir égoïste de satisfaire nos papilles
au mépris de la vie des animaux
et du coût écologique que représente leur consommation.
Un coût écologique pour nous mais aussi pour eux.
Car la Terre est notre maison commune.

De même que le monde n'est pas une marchandise,
les animaux ne sont pas des produits destinés à notre usage.
Ce sont des êtres sentients,
capables d'émotions, de sentiments, de connaissance, de raison,
et nous avons à travers eux d'autres mondes à découvrir.

Il est temps de procéder à une révolution éthique
et d'inclure définitivement l'animal dans notre sphère de considération morale.

Cette stèle que nous avons dévoilée est un acte de mémoire,
mais surtout un engagement tourné vers l’avenir.
Elle est la marque de notre volonté de nourrir le débat public, citoyen,
sur ce qui est dû aux animaux,
JUSQU'A CE QUE CESSE DE COULER LE SANG DES BETES.


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Le discours le plus important de votre vie - Gary Yourofsky

Voici le discours inspirateur de Gary Yourofsky sur les droits animaux et le végétalisme, donné à Georgia Tech, en été 2010. Ecoutez cet orateur étonnant,qui renversera les mythes, remplira votre esprit de faits intéressants et vous aidera à faire un choix éthique dans le but de jouir d'un coeur sain et d'une âme saine. Pour faire de notre monde un meilleur endroit.


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Derrière les murs...


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Un repas végé

Nos choix alimentaires ont une incidence directe sur l'environnement : systèmes de production, transport, pollution, etc. Voulant démystifier le végétarisme et le végétalisme, trois jeunes nous présentent leurs réflexions, leurs constatations et les motivations qui les ont incités à réaliser ce court documentaire. L'instant d'un déjeuner, ils nous présentent le fruit de leur recherche : divers intervenants prennent la parole (diététiciens, végétariens, artistes et célébrités) et nous livrent leurs connaissances, leurs expériences et leurs choix en terme de santé, d'environnement et d'éthique.


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Les protéines végétales


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Stèle sur le site des anciens abattoirs de Vaugirard




Un autre texte lu lors de la Marche pour la fermerture des abattoirs

En posant cette stèle aujourd'hui, nous voulons rendre hommage à ces milliers de chevaux, de vaches, de boeufs, de moutons, abattus ici, à Vaugirard, entre 1898 et 1976.

Dans la frayeur et l'épouvante, combien ont voulu s'échapper, pressentant leur sort funeste ?

Mais rien n'a arrêté leurs bourreaux, ni leurs cris affolés, ni leurs yeux désespérés, ni la vue du sang versé.

Rien n'a ému ceux qui, plus tard, les ont découpés et engloutis, ont digéré leur agonie et fait de leurs estomacs leur cimetière.

En posant cette stèle, nous pensons aussi à ces milliards d'animaux abattus ailleurs, aujourd’hui et demain, sur terre et dans les mers.

Nous pensons à ces myriades de poissons qui ne crient pas, mais se débattent des heures et des jours durant, piégés dans les filets, avant de suffoquer interminablement sur le pont des navires.

Alors, comme Martin Luther King hier, nous avons nous aussi un rêve : celui de voir un jour cesser ce cauchemar carnivore.

Nous avons le rêve de voir la question animale devenir une question sociétale et politique centrale.

Nous avons le rêve d'un monde où les subventions ne seraient plus accordées à ces industries de mort que sont l'élevage et la pêche, mais destinées à la reconversion des travailleurs qu’elles emploient aujourd’hui. Pour qu’eux aussi sortent de ce cauchemar.

Nous avons le rêve d'un monde où humains et non humains cohabiteraient en paix dans une fraternité nouvelle.

Un monde où les animaux ne seraient plus considérés comme des marchandises ou de la viande sur pattes.

Un monde où l'exploitation et le meurtre des animaux seraient enfin devenus illégaux comme l'avaient imaginé Voltaire dans La princesse de Babylone ou bien encore Tolstoï, Louise Michel et Léonard de Vinci pour ne citer qu'eux.

Un monde enfin où les animaux seraient respectés et regardés comme les merveilles qu'ils n'ont jamais cessé d'être.

C'est vers ce monde nouveau que nous sommes aujourd’hui en marche.

Il est grand temps d'abolir nos privilèges humains et de rendre aux animaux la justice que nous leur devons.

Faisons de nos rêves une réalité.

Stoppons l’élevage et la pêche.

FERMONS LES ABATTOIRS.

20 février 2016

(Up) Ces bêtes qu'on abat, de Jean-Luc Daub

Ces bêtes qu'on abat
Journal d'un enquêteur

dans les abattoirs français
(1993-2008)
de Jean-Luc Daub


La viande coûte cher aux animaux. Engraissés dans des bâtiments obscurs dont ils ne sortent que pour être abattus, privés de toute relation avec leurs congénères, entravés, parfois sanglés au point de ne pouvoir bouger, ces animaux sont tués à la chaîne dans l'indifférence la plus absolue. Les enquêtes effectuées par Jean-Luc Daub dans les abattoirs français durant une quinzaine d'années lèvent le voile sur le malheur de milliards d'animaux. La force de ce témoignage tient dans la description, d'une précision extrême, des opérations d'abattage intolérables qui font inexorablement passer les bêtes de vie à trépas, dans ces lieux dont la législation dit " qu'aucun animal ne doit ressortir vivant ". Les instances qui ont compétence pour faire appliquer la réglementation en matière de protection des animaux font preuve d'une passivité qui confine à la complicité. Plus largement, c'est à une réflexion de fond sur la condition des animaux élevés pour être mangés que ce livre nous invite. Pourquoi les avons-nous à ce point bannis de tout ?

Ces bêtes qu'on abat, Jean-Luc Daub, Editions L'Harmattan , 2009, 256 pages

A propos de l'auteur

Parallèlement à son activité d'enquêteur dans les abattoirs pour des associations de protection animale, Jean-Luc Daub travaille en Alsace dans le secteur médico-social ; il est éducateur technique spécialisé auprès de personnes atteintes de troubles psychotiques.

Pour en savoir plus

- Le témoignage et le parcours personnel de Jean-Luc Daub, visiteur d'abattoirs
- Un aperçu du livre
- Végétarisme et non-violence, de Marjolaine Jolicoeur
- Bidoche, de Fabrice Nicolino
- La rubrique végétarisme et végétalisme
- La boutique L214

Sommaire

- Préface d'Élisabeth de Fontenay
- Témoigner
- Mes débuts dans la protection animale
- Aider les animaux d'abattoirs
- Le déroulement des visites d'abattoirs
- Description des différentes méthodes d'abattage
- Qu'est-ce que l'abattage rituel ?
- Un abattoir qui aurait dû fermer
- Des images qui marquent
- Un bouc pas comme les autres
- Avec le personnel d'abattoirs
- Des vaches dans le local d'abattage d'urgence
- Le « bien-être » des porcs
- Un argument publicitaire
- Rouge sang
- Pince électrique jusque dans la bouche
- Vaches mourantes
- Un employé rapide
- Un veau pour distraction
- Suspension des veaux en pleine conscience
- Étourdissement de bovins
- Un abattoir de porcs
- Mon premier marché aux bestiaux
- Un abattoir qui fonctionne « bien »
- La vie misérable des coches en élevage intensif
- La fin des coches à l'abattoir
- Marie
- Une petite vache dans le box rotatif
- Les poussins refusés
- Dernier sursaut d'un veau
- Des hurlements de porcs
- Des chevaux qui attendent
- Infractions en abattage rituel
- Un chariot de lapins blancs
- Un chien dans un fossé
- L'électronarcose par la pince électrique
- La crise de la vache folle et les veaux de la Prime Hérode
- Un appareil d'anesthésie innovant
- Agression sur un marché aux bestiaux
- Déjeuner dans une crêperie du Morbihan
- Une coche assoiffée
- Des animaux qui s'échappent des abattoirs
- Que faire ?
- Pour conclure
- Annexe
- Témoignages de végétariens, leurs parcours

L'analyse du livre
par la LFDA, La Fondation Droit Animal

Journal d'un militant de la protection animale, le livre de Jean-Luc Daub est un témoignage sur les enquêtes effectuées par l'auteur dans les abattoirs français. Cet ouvrage vise à la compassion et se situe dans la mouvance de l'émotion et du sentiment. Ce qui n'exclut nullement, à terme, un appel à la raison, car si, comme le remarque dans sa préface Élisabeth de Fontenay : « Nous sommes horrifiés par ce que son auteur… raconte » (p7) : c'est justement ce choc qui peut être salutaire à notre réflexion.

Avec le livre de Daub, on passe, d'une certaine manière, de l'abstrait au concret, ou de la théorie à la pratique, celle du vécu des abattoirs de notre pays. Certes, comme une large proportion de la population française n'est pas végétarienne, qu'elle soit ou non pourvue de convictions religieuses (pour la question de l'abattage rituel), il existe des abattoirs nombreux dans notre pays. Avec des règlements qui visent à garantir, aux animaux de boucherie, une mort aussi douce que possible. Certes, comme le remarque l'auteur, il existe « des responsables d'abattoirs qui agissent dans leur établissement de façon désintéressée pour éviter un mal-être animal et cela même cinq minutes avant la mort de l'animal » (p207). Il existe « un appareil d'anesthésie innovant » (p181), différent des systèmes actuels qui « apeurent terriblement les animaux et les mettent même dans un état de souffrance » (p185). Et puis il existe aussi quelques cas exceptionnels d'animaux échappés des abattoirs et dont l'aventure s'est bien terminée, par une adoption et une fin de vie paisible. Mais les exemples rapportés par l'auteur sont pour la plupart insoutenables. Ils témoignent d'un mépris presque permanent pour l'animal, et même pour la loi qui vise à le protéger, un mépris qui démontre que, si on veut trouver une bonne image de l'enfer sur terre, c'est bien dans nos abattoirs qu'il faut la chercher.

Il n’est pas possible évidemment de mentionner ici tous les exemples. Quelques citations en donneront une idée. « Les porcs hurlaient et ne voulaient pas entrer dans le local d'abattage » (p63). Un employé rapide « découpait les oreilles, ainsi que le museau et puis la tête, alors que les bovins n'étaient pas encore morts » (p91). « J'assistai impuissant à un déchargement de cochons ne pouvant pas marcher… cette pratique est interdite » (p103). « Certains animaux étaient là depuis la veille sans rien boire ni manger » (p105). « Trois hommes frappaient une vache pour la faire monter dans un camion. Elle avait une plaie ouverte sur la croupe à force de recevoir des coups » (p107).

En préparation du futur abattage et pour conserver une viande « de qualité », l'auteur rappelle la castration à vif des porcelets, en présence de leur mère impuissante : « Les cris des porcelets assaillent ses oreilles, et la panique s'empare des autres mères et petits » (p115). Un abattoir rituel où « tous les animaux étaient abattus selon le rituel, y compris ceux qui précisément, n'étaient pas destinés à l'abattage rituel, ce qui est interdit » (p157). « Pourquoi… ces bêtes en piteux état, sans grande valeur marchande, étaient-elles souvent rouées de coups lorsqu'elles se déplaçaient difficilement… ? » (p189)

Un mot sur les cas des poussins « refusés », c'est-à-dire qui doivent être éliminés. « Pendant longtemps ils étaient simplement jetés vivants dans des bennes avec les coquilles vides… [maintenant parfois] les poussins sont jetés dans des poubelles qu'on entasse l'une sur l'autre afin de les faire mourir par écrasement… [ou encore ils sont] enfermés dans des sacs où ils meurent d'étouffement… [d'autres enfin passent dans des broyeurs] qui, comme leur nom l'indique, broient les poussins… » (p145).

Partout, dans ces lieux évidemment à l'abri des regards du public, on rencontre fréquemment l'indifférence des abatteurs, des vétérinaires, des administrations. Partout des attentes d'animaux conscients et intelligents, comme les porcs, dans des pièces sales, insalubres, bruyantes, puant la sueur et le sang, sans eau, sans confort, sans égard, sans autre contact que la brutalité sous toutes ses formes. Souvent « pour ce qui concernait le personnel, c'est simple : il était incompétent et n'avait reçu aucune formation ; celle-ci est pourtant obligatoire » (p60). Quant aux administrations et aux pouvoirs publics, ils brillent souvent par leur absence lorsque l'auteur les sollicite conformément à la loi : « nous étions face à une inertie totale » (p61).

Écoeuré par ce qu'il a vu, l'auteur est devenu végétarien, et, témoignage jusqu'à bout, son livre se termine par des parcours de vie de personnes devenues végétariennes. Conscient du fait que Rome ne se fera pas en un seul jour, l'auteur donne aussi quelques conseils de bon sens, pour ceux qui ne se sentiraient pas en mesure de faire un choix végétarien immédiat : « Le plus facile, pour commencer, est d'effectuer le bon choix lorsque vous achetez des oeufs » (p231) : les oeufs de poules élevées en plein air issus de l'agriculture biologique (code « 0 ») proviennent d'oiseaux non mal traités. A ceux qui soutiennent la thèse abominable qu'on ne peut pas se préoccuper à la fois du bien-être des animaux et de celui des humains, Jean-Luc Daub apporte, par son attitude, un démenti formel, puisqu'il a mis sa vie professionnelle au service des humains handicapés et consacré ses loisirs au bénévolat de la protection animale.

Finalement, on l'aura compris, le livre de Catherine Rémy et celui de Jean-Luc Daub, très différents dans leur conception, dans leur projet, dans leur mode de pensée même, se complètent fort bien et convergent vers une mise en question de la mise à mort des animaux. Les deux ouvrages donnent une bien triste image de l'espèce humaine, qui pourtant aime tant se placer en haut des hiérarchies qu'elle invente ! Combien de temps notre espèce, fière des capacités de son cerveau, continuera-t-elle à se vautrer dans de telles pratiques ? Des pratiques que beaucoup de ses membres n'oseraient même pas affronter personnellement, sans se réfugier dans ce que Catherine Rémy a diagnostiqué comme une distanciation dans l'imaginaire, un refus de ne pas voir en face la réalité de ce qu'on fait, finalement un effort pour dégrader des êtres sensibles qui ne le méritent pas.

18 février 2016

(Up) Livre en ligne : Victimes silencieuses, de Samir Mejri

VICTIMES SILENCIEUSES
Deux années dans un laboratoire
d'expérimentation animale

de Samir Mejri
préface de Brigitte Bardot

Mise à jour :
Mise en ligne du livre

L'avant-propos

Ce livre est un témoignage, un drame de conscience et non une dénonciation.
Il n'a pas été fait contre une cible particulière. Il n'est qu'un passage dans le temps, d'un univers sordide. Il est un exemple afin de continuer à méditer sur la façon dont se fait l'expérimentation animale. C'est un vieux débat... Une habitude ancrée dans un système archaïque et peu scrupuleux de la loi, de la vie, de l'environnement.

A travers ce livre, c'est l'histoire d'un homme - Samir MEJRI - qui, à un moment de son existence, avait le choix entre le "chrome" et la "vie réaliste". Un homme qui se sentait floué dans le plus profond de sa chair. Au-delà du numéro de Sécurité Sociale, du confort matériel, de la considération de ses proches, il n'arrivait pas à coller avec la "vérité du sujet". Quitter ce monde de tortures, d'expériences, devenait une obsession. Malgré toute la sécurité de l'embauche que cet emploi lui donnait, il ne pouvait cautionner cet univers de honte. Il voulait bien croire qu'il était heureux, mais la pilule ne passait pas.

Pourtant des "galères", il en avait vécues. Il sortait avec sa femme d'un trou noir. Mais rien ne pouvait justifier sa fiche de paye et son confort illusoire. Sa prise de conscience l'a remis dans le trou noir... le couple est reparti "aux galères", mais libre... Deux ans dans un laboratoire c'est une expérience longue et douloureuse. Ses proches ne comprenaient pas pourquoi il avait fui la "sécurité de l'emploi". A force d'être harcelé, Samir MEJRI a décidé avec l'aide d'un copain d'écrire son témoignage. C'est pour cela que "Victimes Silencieuses" existe. Il dénonce le vaste trafic de chiens et chats vendus secrètement et illégalement. Mais, il faut savoir aussi qu'il existe une vente par correspondance et sur catalogue - tout à fait légale - des animaux destinés à la vivisection.

Des chercheurs de tous poils et de tous domaines s'intéressent aux résultats de l'expérimentation animale. Derrière cet intérêt se cache le plus sordide massacre des innocents. Si nous avons falsifié les noms des personnes et des lieux, c'est par pudeur. C'est aussi pour ne pas donner prise à une querelle de personnes. C'est enfin, dire que ce témoignage aurait pu avoir lieu dans n'importe quel laboratoire de vivisection. Ces laboratoires ont "pignon sur rue".

L'homme s'est protégé contre les abus de l'expérimentation en décembre 1988. A quand la protection contre les abus de l'expérimentation sur animaux ? Les positions antagonistes s'accentuent. L'Académie des sciences, partant du principe que la condition de l'espèce humaine est une priorité absolue, indique : "compte tenu de la complexité du vivant, l'expérimentation animale ne peut être abolie. La même Académie souhaite que les conditions d'élevage, de transport et de stabulation des animaux destinés à l'expérimentation obéissent aux règles strictes de l'éthique et que soient offertes aux laboratoires des possibilités d'approvisionnement dûment organisées et réglementées". On peut voir l'écart entre ce qui se pratique tous les jours et ce que l'autorité réclame.

L'éthique ?... "Il n'y a pas d'éthique humaine qui soit séparée de l'éthique animale", disait le professeur Schwarzenberg... A la veille du 21e siècle, nous disons que l'éthique humaine, animale, végétale sera une nécessité pour la survie de la planète. On a vu naître des comités d'éthique dans le domaine médical... A quand les comités d'éthique dans le domaine animal ?... Végétal ?... Là est notre combat... faire évoluer les méthodes dépassées de l'expérimentation animale et... végétale, c'est contribuer simplement à l'évolution de l'homme.

C'est pour ces raisons que nous publions ce témoignage.

L'éditeur

Victimes silencieuses, Samir Mejri, Préface : Brigitte Bardot, Editions Terradou, 1991, 240 pages

A propos de l'auteur

Samir Mejri fut recruté comme animalier par un laboratoire pharmaceutique en 1988. Il démissionna quelques mois plus tard, profondément choqué par l'atrocité des expériences pratiquées sur les animaux et par l'indifférence, voire le sadisme, du personnel du laboratoire. Il a écrit "Victimes Silencieuses" pour témoigner de ce qu'il avait vu.

Pour en savoir plus

- Cet article reproduisant d'autres extraits
- Cette liste de marques de produits d'entretien et cosmétiques non testés sur les animaux (format PDF), que vous trouverez facilement dans les magasins de produits biologiques
- Les rubriques Expérimentation animale et Industries - Lobbies

Extraits

P80-P85
../.. - En ce moment, me dit tout excitée Mme Tristaut, nous cherchons à connaître les potentialités du BL13196 [le numéro de la substance est faux volontairement] dans le cas d'une ischémie cérébrale, afin de contrer les effets du P.A.F.
Tout cela me semble très intéressant et pour une fois je suis impatient de finir mon repas pour descendre au sous-sol ! Je savais qu'ils faisaient leur manip sur des gerbilles, raison pour laquelle je ne cessais d'apprendre l'anatomie de ces petits animaux, mais je croyais que l'on faisait ça sur des animaux morts. Mme Tristaut ressort de l'animalerie avec un chariot contenant plusieurs caisses de gerbilles, pourtant bien vivants.
Avec une rapidité et une précision étonnante, Mlle Dupont rentre sa main dans une caisse, en sort un gerbille qu'elle tient par le cou, le pose sur la balance électronique bien incapable de donner un chiffre stable car le gerbille ne cesse de se débattre, ses petites pattes glissant sur le plateau en aluminium. La technicienne n'a donc qu'une idée approximative du poids de l'animal. Bien difficile d'évaluer, dans ces conditions la dose d'anesthésique calculée en fonction du poids de chaque animal.
Après les quelques secondes passées sur la balance, la technicienne, sans relâcher son étreinte, pose le gerbille sur la paillasse et le plaque sur le dos. De peur, ou bien du fait que la technicienne appuie trop fort avec son autre main sur son ventre, le gerbille se pisse dessus. En un éclair, l'animal reçoit sa dose d'anesthésique, là où c'est possible. Pendant ce temps, Mme Tristaut scotche sans ménagement les petites pattes. Je vois se reproduire l'opération une centaine de fois, avec une dextérité qui ne saurait dater de l'expérience d'une ou deux manips, mais bien de milliers de gerbilles. Je me souviens avoir souri nerveusement en pensant à la parodie du travail à la chaîne de Charlie Chaplin dans "Les Temps Modernes". J'ai bien dit "nerveusement", car la vision de ces petits corps alignés, se pissant dessus de trouille et essayant vainement de décoller leurs petites pattes du ruban adhésif, n'a rien de vraiment comique, enfin pour moi ! Car tout en s'exécutant, ces demoiselles racontent la dernière blague du laboratoire qui consiste à mesurer, ou à défaut d'évaluer, la longueur du pénis de leurs hommes afin de pouvoir comparer ! Aussi odieux que cela puisse paraître, c'est néanmoins la vérité, c'est dire le degré d'endurance à infliger la souffrance à autrui qu'elles ont atteint.
Mlle Dupont revient alors au premier de la file qui est loin d'être endormi. Soit que la dose d'anesthésique eut été trop faible, - on préfère largement sous-anesthésier car le contraire risquerait de tuer l'animal, ce qui impliquerait une perte de temps - soit qu'il se soit déjà réveillé alors que les techniciennes étaient en train de s'occuper du centième. En fait d'anesthésie, cela se rapproche plus d'une prémédication, un peu comme si on vous donnait un comprimé de valium avant une opération !
J'ai devant moi, la preuve flagrante que la tentative d'anesthésie selon les règles, n'est pas possible. En pratique on sautera cette étape.
- C'est comme un cercle vicieux, me dit Mme Tristaut.
- C'est du temps perdu pour rien, conclut Mlle Dupont.
Il faut se rendre à l'évidence, pourquoi perdre son temps à injecter la graduation exacte d'anesthésique à ces bestioles, puisque de toute façon une fois arrivé au centième le premier se réveille !
Mlle Dupont, braque, ensuite, une lampe forte sur le premier gerbille et tout en maintenant sa petite tête plaquée en arrière, elle fait une entaille avec le scalpel à hauteur du larynx. L'incision du scalpel arrache des petits cris de douleur au gerbille, qui ne se doute pas que son calvaire ne fait que commencer.
Elle écarte avec une pince la chair déjà entaillée permettant à la lame de s'enfoncer plus profondément, jusqu'à la dénudation des artères carotides. Le gerbille souffre de plus en plus le martyre. Malgré l'expression de ses tous petits yeux larmoyants, des mouvements violents de ses petites pattes et des tentatives de morsures désespérées sur la main de la technicienne, celle-ci continue. Elle remplace son scalpel par une autre pince qui lui permet de crocheter les carotides et de les tirer vers elle légèrement, la moindre précipitation risquant d'aboutir à leur éclatement. Puis elle glisse sous les artères un gros fil chirurgical permettant de maintenir les carotides hors de l'orifice qu'elle attache à la manière d'un "noeud papillon". Le gerbille est alors prêt à être clampé [clampage : occlusion momentanée d'un vaisseau pour arrêter son courant intérieur]. Elle passe au suivant. Une centaine d'autres subissent le même calvaire, une dizaine mourront. Pendant l'opération, il faut éviter de trancher une veine ou une artère. Dans ce cas le sang gicle aussitôt, arrosant la paillasse, les murs et la figure de la technicienne qui se trouve penchée sur l'orifice. Elle s'essuie d'un revers de manche. Pendant ce temps, le gerbille meurt à petit feu, son sang continuant de couler peu à peu. Pour les autres la manip ne fait que commencer. Il faudra que le premier attende que la technicienne ait fini de s'occuper de ses confrères. Puis, elle leur injecte les produits dont je vous ai parlé plus haut, et elle clampe les artères carotides à l'aide de petites pinces. Le temps leur est alors compté, car il faut pouvoir clamper toutes les gerbilles en moins de dix minutes, temps imparti pour revenir déclamper et procéder à une autre injection. Tout se fait à cadence accélérée. La scène n'en est que plus impressionnante.
A ce stade-là, la majorité des animaux sont, soit morts, soit dans un coma irréversible. Afin de savoir dans quelles parties du cerveau les produits ont réagi, et en quelles proportions, les techniciennes prennent les corps des gerbilles inertes et coupent à l'aide de gros ciseaux les petites têtes. Les corps décapités tombent, les uns après les autres, dans un sac poubelle en plastique. J'entends encore aujourd'hui le bruit que font les corps qui s'accumulent dans le sac, agité par saccade, des derniers soubresauts de ces petits êtres.
Avec moins de soin que si elle épluchait des oignons, Mme Tristaut, cigarette à la bouche, découpe les minuscules têtes pour en extraire le cerveau qui sera pilé dans le mortier électrique. Après centrifugation de la bouillie obtenue et grâce au marquage préalable du P.A.F par des substances radioactives, on réussit à en déduire sur quel type de cellule cérébrale le P.A.F. ou son antagoniste le BL13196 est le plus actif.
Pour les gerbilles dont le malheur est d'avoir survécu, on enlève le fil maintenant les carotides à l'extérieur, puis on referme l'entaille dans le cou avec des agrafes chirurgicales. On les "jette" ensuite dans une espèce de cage vitrée, afin de pouvoir les observer et faire des études comportementales. Ces pauvres gerbilles offrent un bien triste spectacle, leur cerveau partiellement détruit à cause de l'arrêt de la circulation, ils s'agitent comme des pantins désarticulés dans des mouvements désordonnés et violents, ou bien se traînent lamentablement une, ou plusieurs parties du corps, paralysées.
Une gerbille est soudainement prise par une de ces crises. Comme si son petit corps était possédé, elle se met à s'agiter par saccades, si violemment que les agrafes, maintenant l'entaille dans son cou, fermée, se détachent, provoquant une hémorragie. Le sang jaillit aussitôt de l'orifice arrosant les vitres de sa cage comme si une explosion venait de se produire.
A la fin de la manip, et après avoir vu tout ce sang gicler, je suis comme groggy par tant de souffrance. A plusieurs reprises j'ai fermé les yeux, je me suis crispé en entendant les cris des gerbilles. Sans qu'elles se moquent franchement de moi, j'ai surpris Mlle Dupont et Mme Tristaut échanger des regards qui ne prêtaient guère à confusion, ma sensibilité est considérée par elles comme de la sensiblerie. Dire qu'il y a tellement d'animaliers qui rêvent de devenir technicien de laboratoire et s'exécutent sans rechigner dans ce genre de manip, moi, à qui on offre cette place en or sur un plateau, je fais le difficile pour quelques cris d'animaux alors que l'on fait preuve à mon égard de tant de patience. ../..

P87-P90
../.. Ce mois de septembre s'annonçait aussi prometteur que les deux mois de bonheur que nous venions de passer. Je reçois enfin le coup de fil du concessionnaire m'annonçant la livraison de ma voiture. Je la bichonne, comme un gosse, et je suis fier de cette ostensible preuve de mon nouveau statut social.
Pourtant un beau matin de ce mois de septembre, je rentre dans l'animalerie des petits rongeurs pour donner à boire aux animaux lorsque j'entends des cris de lapins, comme je perçois également le bruit de ciseaux que l'on pose sur la paillasse, mon intuition me dicte de rentrer à pas feutrés pour surprendre ce que l'on pouvait bien faire à ces lapins avec des ciseaux alors qu'on ne leur fait habituellement que des prises de sang. J'étais loin de me douter de ce que j'allais découvrir !
Je vois la Berthe en train de choisir un lapin dans les cages que l'on venait de livrer. Elle pose le lapin sur la paillasse et lui coupe les oreilles, mais pas d'un coup net, elle fait une entaille puis arrache la partie restante. Elle s'y reprend à deux fois, le lapin se débat avec frénésie, il n'a aucune chance, fermement aplati par la grosse main de Berthe. Il a ses oreilles qui pendouillent encore par un petit bout de chair. Elle ne s'est toujours pas aperçue de ma présence, bien trop concentrée sur son travail de boucher. Moi, je sens la haine monter en moi, mais la stupeur me fige et m'empêche d'agir. Berthe reprend les ciseaux et assène des coups de pointe sur la tête du pauvre lapin. Le sang gicle et coule à flots. Puis calmement, elle va mettre le lapin dans une cage sur le chariot. C'est à ce moment qu'elle m'aperçoit.
- Ça va pas la tête ! Pourquoi tu les fais souffrir comme ça ?
- Fais pas ch..., occupe toi de tes oignons !
me répondit-elle après avoir maîtrisé l'effet de surprise. Puis elle sort le buste droit en jouant l'imposante.
Je suis abasourdi par tant de cynisme. Je l'entends dans le couloir en train de m'insulter, mais mon attention reste fixée sur les gouttes de sang qui vont de la paillasse aux cages des lapins. Apparemment ce n'est pas le seul qu'elle a "opéré", je regarde dans les cages et je n'ai pas de mal, au milieu de ces lapins blancs immaculés, à en découvrir également deux autres dans un état lamentable, la tête en sang, les oreilles arrachées, il y en a même un qui a un oeil crevé. Mais pourquoi ?
Bien décidé à en découdre avec cette salope, je sors comme un fou furieux de l'animalerie à la recherche de la grosse Berthe.
Mme Tristaut qui a entendu Berthe gueuler dans le couloir que je n'étais qu'une poule mouillée et autres insultes relatives à ma sensibilité avec les animaux, m'appelle. Elle me dit que Berthe est allée voir le pharmacologue au rez-de-chaussée :
- Calme-toi Samir, viens. Je vais t'expliquer, mais calme-toi !
Elle m'amène en salle de stérilisation.
- Ne te mets pas dans un état pareil pour si peu, tout le monde est au courant de la magouille de Berthe et Farid avec les nouvelles livraisons.
C'est la douche froide ! Je suis prêt à lui couper les oreilles à la grosse, et Mme Tristaut est en train de me dire que tout cela est normal, que tout le monde est au courant, mais pour trois lapins, ce n'est pas la peine de faire un tel cinéma !
Calmement Mme Tristaut m'explique :
- Berthe est montée voir le pharmacologue pour lui dire qu'il y a trois lapins qui sont inutilisables dans la nouvelle livraison, comme ça elle se les met de côté. C'est tout.
Elle m'explique cela avec un tel naturel que je reste cloué sur ma chaise. Alors que Mme Tristaut, satisfaite de m'avoir calmé, s'en va, j'essaie de comprendre. Et puis "Tilt", étais-je naïf ! Berthe esquinte les oreilles des lapins pour faire croire que les blessures résultent de bagarres, voilà pourquoi elle ne les coupait pas "proprement" d'un coup net. Les coups de pointes de ciseaux étaient censés simuler des morsures. J'avais effectivement déjà vu des lapins s'amocher au cours de combats, la promiscuité dans laquelle ils vivent, quatre, parfois cinq par cage, ne pouvant que favoriser ce genre de "défoulement" sur un de leur congénère plus faible. Les oreilles ainsi abîmées, le lapin est en effet "inutilisable" puisque c'est sur les oreilles que l'on pratique les prélèvements sanguins.
La Berthe se choisissait donc trois beaux spécimens, garantis exempts de toutes contaminations puisqu'ils venaient d'élevages spécialisés dans l'approvisionnement des laboratoires ; elle leur tailladait les oreilles, puis allait voir le pharmacologue responsable de la "marchandise" pour lui rapporter, d'un air faussement affecté, qu'une fois de plus il y avait trois "rebuts" dans la nouvelle livraison, et qu'il faudrait en recommander trois autres. Le pharmacologue qui s'en tape comme de sa première chaussette, félicite Berthe pour sa conscience professionnelle. Une fois obtenue la bénédiction du pharmacologue, rien n'empêchait plus Berthe et Farid de se "mettre les lapins de côté" et de se les préparer au vin blanc.
Tout le monde le sait et tout le monde s'en fout. ../..

P97-P101
../.. Un jour Farid vient me trouver :
- Samir viens voir, je vais te montrer comment on nettoie la "pièce noire."
C'était la première fois que j'entendais parler de la "pièce noire", mais son invitation ne m'incita pas à la curiosité. J'étais plutôt porté à la rigolade car je devinais que l'ami Farid, arrivait avec ses gros sabots et l'idée de m'apprcndre quelque chose dont je n'étais pas encore au courant, pour pouvoir dire "maintenant tu sais tout, tu peux rentrer dans les tours de garde comme tout le monde." Il n'était pas très futé le Farid !
- Te fatigue pas Farid, lui répondis-je, je ne les ferai jamais les tours de garde.
Il affiche un air surpris, il ne devait pas avoir prévu ce genre de réaction ! Puis, récusant toute manoeuvre intéressée, il m'invite de nouveau :
- C'est juste pour voir, qu'est-ce que tu vas imaginer là !
Amusé de le laisser s'empêtrer dans sa propre combine, je lui déclare :
- Ha ! alors, si c'est pas intéressé !
Je me décide à le suivre. Il passe d'abord dans l'animalerie des lapins pour y prendre une clé camouflée derrière la porte. Au passage, il déroule la lance à incendie et la tire avec lui tout en se dirigeant vers la porte de sortie de secours tout au bout du couloir, à part arroser les plantes dehors, je me demande ce qu'il peut bien m'emmener faire. Avant d'arriver au bout du couloir, il s'arrête et ouvre une porte sur sa gauche.
- Elle est bien bonne celle-là, il y a une porte ici ! dls-je étonné.
Je ne l'avais même pas remarquée, d'abord parce qu'il n'y avait rien à faire au bout du couloir, et puis parce que cette porte sans poignée était confondue avec le prolongement du mur, le genre de porte qui vous fait penser à un placard à balais.
Farid tourne la clé, et ouvre. Une odeur pestilentielle me pique les narines et me fait bloquer la respiration. Je ne puis m'empêcher de lui dire à quel point ça pue, alors qu'il repart mettre la lance sous pression.
- Tiens la lance me dit-il.
Je m'exécute et tout en mettant mon tee-shirt au dessus du nez, je tente de regarder ce qu'il peut bien y avoir derrière cette porte : une autre porte ! Entre les deux une trentaine de centimètres comme dans un petit sas. Le temps que Farid revienne, je remarque que la deuxième porte est faite dans une espèce de plexiglas transparent, mais la pièce de l'autre côté est dans le noir complet.
- C'est une porte de protection au cas où il y en aurait un qui te sauterait dessus, la lumière est à côté de toi, me dit Farid.
J'actionne l'interrupteur, un peu anxieux "qu'un me saute dessus". Je suis sûr qu'il veut se payer ma tête avec ses idioties, et je suis en train de marcher dedans à fond !
A travers la porte en plexiglas maculée de souillures de bas en haut, j'entr'aperçois des formes qui se déplacent rapidement pour converger dans l'angle opposé à la porte. Farid ouvre la porte en plexiglas et je vois pour la première fois l'animalerie des chiens.
C'est une pièce toute carrelée, sans autre ouverture qu'une petite bouche d'aération au plafond, un trou au milieu du sol pour évacuer les immondices, et la porte en plexiglas. Celle-ci étant toujours fermée, les chiens sont dans le noir 24h sur 24.
Les chiens sont loin d'être des Beagles que ces messieurs prétendent utiliser exclusivement. Il y a là un cocker, des sortes d'épagneuls bretons, un fox terrier et des chiens de berger bâtards. Ils sont tous dans un état pitoyable, n'ayant pas d'autre endroit pour vivre que ce carrelage détrempé d'urine et plein d'excréments, ils sont d'une saleté repoussante, l'odeur de la pièce, sans aération digne de ce nom est réellement suffocante. Les chiens sont là, tremblant de peur. Ils s'entassent les uns sur les autres dans ce coin de la pièce cherchant désespérément à enfouir leur tête et leur corps squelettiques sous ceux de leurs confrères d'infortune, afín d'échapper à la lumière qui les aveugle.
Fartd, totalement insensibilisé, m'explique qu'il suffit à l'aide du jet d'eau, de ramener toute la merde dans le trou du milieu de la pièce par où s'écoule l'eau, je regarde ces êtres fantomatiques au regard soumis, tenter d'éviter le jet d'eau en glissant sur le carrelage mouillé. J'ai peut-être vu ce jour là, sans le savoir, la tendre boule de poils qui vous manque tant.
Une fols sa corvée de nettoyage terminée, Farid prend deux poignées de biscuits secs dans un sac entreposé dans le sas et les jette à même le sol mouillé. Les plus forts se jettent dessus, le petit cocker et un épagneul breton se contenteront de quelques miettes, il y a une sorte de pointer dans le coin, le corps secoué de tremblements, le regard vide, qui ne bouge même pas. D'autres lèchent le carrelage fraîchement mouillé, il n'y a pas de gamelle dans la pièce. Puis Farid referme la porte, un chien aboie, il éteint la lumière et tire la porte donnant dans le couloir, les aboiements deviennent presque inaudibles. Je sais maintenant d'où venaient ces hurlements étouffés que j'entendais plus nettement aux WC, et cette puanteur qui était soi-disant due "à des remontées d'égoûts".
Je suis profondément écoeuré, je sens mon estomac se contracter. Farid, lui, enroule tranquillement le tuyau de la lance à incendie, puis passe la serpillère :
- Fais gaffe, il reste toujours un peu d'eau dans la lance, la dernière fois je me suis fait engueuler d'avoir foutu de l'eau partout.
La seule préoccupation de ce demeuré c'est de ne pas mettre de l'eau par terre après avoir refermé la porte sur ces êtres vivants, sensibles et capables de tant d'affection envers les hommes. La dernière récompense à leur dévouement sera donc cette "pièce noire" infâme et puante. ../..

P104-P108
../.. En passant devant la porte entrouverte, j'entends les gémissements d'un chien. Mais des gémissements faibles et très lents, une plainte langoureuse dont l'intensité sonore est basse, mais dont l'intensité émotionnelle est telle qu'elle s'infiltre en moi, et me bouleverse. Il y a dans cette complainte ce quelque chose d'universel, qui malgré la barrière de la langue, ou de l'espèce, vous fait ressentir avec acuité la souffrance d'autrui. Involontairement mon souffle se synchronise avec celui de l'animal. Mon coeur bat à toute vitesse alors que je pousse doucement la porte, puis j'ai la sensation qu'il s'arrête, alors que le souffle de l'horreur percute mon cerveau avec violence.
Le chien est là, sur une grosse table en aluminium, allongé sur le dos. Les pattes attachées en croix, essaient dans des mouvements de torsion, arrachant la peau et les chairs, de se libérer de ces lanières que j'avais découvertes dans un évier quelque temps auparavant. Des tas de tuyaux sortent de son ventre ouvert, je vois les intestins à nu, monter et descendre au rythme des mouvements respiratoires, au rythme des gémissements. Je m'avance pour voir la tête du chien. Sa gueule est maintenue grande ouverte par un grossier appareillage en fer. C'est alors qu'il pose son regard sur moi. Je comprends ce qu'il me dit, sans mot, au travers de ses yeux larmoyants d'où émane une tristesse qu'il me transmet, il implore ma pitié.
C'est alors que le pharmacologue qui était penché au dessus du congélateur, se redresse et me voit. Il a une canette de bière à la main, et sur son bureau traîne un sandwich huileux. Il a encore la bouche à moitié pleine lorsqu'il m'engueule :
- Qu'est-ce que tu fous là I Tire-toi vite. Tu gênes avec tes microbes, tire-toi et ferme cette porte !
Si je vous décris objectivement le pharmacologue qui s'occupait de la salle de cardio, vous allez croire que j'exagère, et pourtant !
Franck a la quarantaine, il est gros de partout : du double menton aux doigts boudinés, la graisse a tout investi. Il sue à grosses gouttes du matin au soir, été comme hiver. Il boit son pack de bière qu'il amène tous les jours avec lui, il a sa bouteille de rouge dans le placard des couverts au self. Il parle fort et grossièrement, toujours en train d'essayer désespérément de se rendre intéressant auprès de la gente féminine avec ses blagues de cul, sans s'apercevoir du dégoût qu'il inspire.
Cela paraît peu vraisemblable qu'un tel personnage puisse travailler dans une unité de recherche au sein d'une multinationale pharmaceutique et pourtant, je n'invente pas ce personnage pour les besoins d'un roman, c'est la vérité. Cet être abject, le "gros porc" comme tout le monde l'appelait, avait la responsabilité des expériences de cardiologie menées sur les chiens.
Je ne réponds pas à son invitation si poliment exprimée, de sortir sur le champ de son labo. La scène de ce chien qui continue de gémir pendant que cet être immonde boit goulûment sa canette de bière en rotant, me révolte au point que je ne puis décrocher mes yeux de ceux du chien. Franck doit réaliser que je suis l'animalier "neveu du directeur" car il change soudainement de ton :
- Ah ! Mais t'es Sarnir ! C'est qu'ils m'emmerdent à rentrer dans mon labo comme dans un moulin, alors j'en ai un peu marre, tu comprends ?
Je comprends surtout que l'excuse des microbes était un mensonge, lui qui bouffe son sandwich et pue la transpiration, il n'en apporte pas des microbes ? Et si l'affirmation selon laquelle il s'agissait de chiens amenés par la S.P.A au lieu d'être euthanasiés au refuge était elle aussi un mensonge ?
- Ce chien n'est pas anesthésié ?
- Bien, si t'anesthésies le clebs, vu qu'on fait des recherches sur une nouvelle substance, on veut être sûr que les résultats ne seront pas faussés par aucune autre substance.
Ils s'étaient payés ma tête avec le coup des lambeaux de peau sur les lanières. "Ils sentent rien, ils sont anesthésiés" m'avait dit Berthe. Sous mes yeux je vois les pattes entaillées jusqu'aux tendons continuer à tirer sur les liens.
Mais alors, cela devait être également des mensonges leur histoire de gerbilles qui ne souffrent pas ! Et d'où viennent tous ces chiens, je ne peux plus croire que ce soit la S.P.A qui les amène à ces bourreaux. Mais bon sang, on se fout de ma gueule depuis le début ! Je sais maintenant pourquoi Paul ne voulait pas venir dans le labo avec sa femme. Ils savaient tout eux aussi ! Je me retrouve dans une situation où toutes les valeurs sur lesquelles je faisais reposer ma confiance se dérobent tout d'un coup et me font vaciller de mon univers ouaté dans la cruelle réalité de la Vérité du mot vivisection.
- Ça va pas Samir ? T'es tout pâle ?
J'ai l'impression de me retrouver à la place d'un enfant qui découvre que le plat dont il se délecte depuis tout à l'heure n'est autre que son bien aimé lapin "Bunny", qui était soi-disant "parti dans les étoiles" et qui se retrouve en sauce avec des pruneaux dans son assiette.
Je bredouille quelque chose comme "c'est dégueulasse" avant de partir, complètement "groggy".
Je vois des gens qui me regardent bizarrement, je fais des gestes automatiques. Je me retrouve devant un plateau au self, puis la montre indique 5h, je rentre avec Christine chez nous.
Christine est déjà plus réceptive que la dernière fois :
- Pour être dans un état pareil, c'est que c'est sérieux ! dit-elle en essayant de plaisanter.
Je lui raconte l'horreur, la souffrance de ce chien étripé à vif au nom de la recherche. Je dors mal, cette nuit-là. La suivante aussi ; et même aujourd'hui, cette vision lancinante de ce chien qui me demande de l'aide à travers ses yeux remplis de détresse, vient encore me tourmenter. ../..

P112-P117
../.. Je vais d'abord prendre conscience de la notion de "débit" d'animaux. Tous ces sacs remplis de corps de gerbilles, de têtes de gerbilles, de souris, de hamsters, de lapins, de chiens, qui vont via les congélateurs à l'incinérateur, il faut bien qu'ils soient remplacés puisque la noria des sacs est sans fin. Je croyais, naïvement je vous l'accorde, que les animaux dont je m'occupais, étaient les mêmes depuis ma première visite des animaleries le jour de mon arrivée. Mais, il y a beau y avoir un millier de gerbilles dans l'animalerie, si un seul test d'ischémie cérébrale en consomme une centaine, le stock sera vite épuisé. Je ne vais pas tarder à me rendre compte que toutes les semaines, plusieurs caisses arrivent par avion d'Angleterre, d'un élevage spécialisé. Puis il y a la livraison des lapins, des souris, des cobayes, tous ces animaux étant la source d'un commerce lucratif, avec démarches commerciales et luttes entre les élevages pour se maintenir sur le gourmand "marché" de la vivisection.
D'ailleurs, il ne s'agit pas de la vente d'animaux, mais bien d'un commerce de "matériel de laboratoire", ou encore de "réactif animal" selon les termes consacrés. Je ne tarde pas à me rendre compte que le concept d'animal et être vivant sensible est totalement aboli, dès que les animaux franchissent la porte du laboratoire. Ils deviennent alors des objets, auxquels on accorde autant de tendresse qu'à sa machine à écrire ou son mortier électrique. La preuve m'en sera donnée lorsque le Dr Robert me demande d'afficher une note de service dans tous les laboratoires. Elle rappelle à chaque employé de l'Institut qu'il "faut faire preuve de parcimonie en ce qui concerne l'utilisation des feuilles pour la photocopieuse, ainsi que du matériel en général, animaux compris.".... Cette note de service est signée par Paul, directeur général. Ce même Paul qui me téléphone des Etats-Unis pour savoir comment va sa chatte "Pussy", qui caresse avec tendresse sa chienne et qui va à la messe tous les dimanches matin.
Je ne sais comment ces gens parviennent à concilier le règne de l'amour dont ils parlent dans leur église, avec la souffrance qu'ils génèrent chaque jour. Pendant un moment ce sujet a même été un thème de réflexion pour moi. Par quelle pirouette s'absolvent-ils de tout cela ?
J'ai pu trouver une réponse dans un livre, ou l'auteur mettait deux textes, commentant le même phénomène, mais l'un vu par un croyant, l'autre par un athée et curieusement si l'on n'y prend garde, on serait tenté d'inverser les auteurs respectifs de ces réflexions. Il s'agissait, je m'en souviens, du massacre des baleines. Le croyant, Svend Foyn, inventeur du harpon à tête explosive qui allait décimer jusqu'à l'extinction plusieurs espèces de baleines déposa son brevet la veille de Noël, jour symbolique s'il en est, et écrivit dans son journal : "Je te rends grâce, Seigneur. Toi seul en es l'auteur."
L'autre écrivait avec ironie et tristesse : "Dieu sait si nous avons fait assez de mal sur cette planète, mais éliminer les plus gros animaux que Dieu a créés, témoigne d'une arrogance et d'un manque de clairvoyance qui en disent plus long sur l'intelligence de l'homo sapiens que n'importe quelle grande équation mathématique ou oeuvre d'art."
Je ne veux pas donner à mon récit une orientation anti-religieuse, croyez bien que j'admire Soeur Thérésa, tout comme les chefs spirituels de la trempe du Dalaï Lama, mais que penser de ces messieurs qui garent leur grosse voiture sur le parking de l'église le dimanche, vont prier pour l'amour et de retour au laboratoire stockent des chiens comme des balais dans une remise ?
Pour moi, toucher un animal, un être vivant implique, ipso facto, la mise en place d'une relation. Je le perçois, il me voit, il m'entend, il y a implicitement relation, fût-elle "passive". J'avoue avoir du mal à formuler ce qui m'apparaît comme une évidence.
Lorsque je touche un objet, lorsque je m'occupe de stériliser des éprouvettes, il n'y a pas de relation. Comment peut-on mettre sur le même niveau de préoccupation, une économie de feuilles de papier pour la photocopieuse, et la vie d'un chien, d'un lapin ou d'une gerbille ? Rentrer dans un tel système de pensée, annihile tout simplement le respect de ce don, que certains définissent comme divin : la vie.
Pour Farid c'est de ne pas se faire "engueuler" en mettant de l'eau dans le couloir qui importe; et pas ce que peuvent ressentir ces corps animés par la vie, plongés dans le noir, la faim et la peur, derrière la porte en plexiglas. Partant de là, tout est possible. Mon apprentissage dans ce domaine ne faisait que commencer.

J'étais en train d'emballer des outils chirurgicaux pour les stériliser lorsque je perçois le bruit des griffes d'un animal se débattant dans les bacs en plastique faisant office d'évier dans l'animalerie des petits rongeurs. Peut-être y a-t-il un lapin qui est resté là après le nettoyage en grand d'une des cages ?
Un bruit mat, le cri d'un lapin et de nouveau ce bruit des pattes contre la cuve m'incite à aller voir.
Farid a sorti une cage de lapins du chariot et l'a posée sur la paillasse.
- Salut Samir, ça va ?
- Ça va.
Je remarque que du sang a dû gicler sur sa blouse, sur le mur, au dessus du bac, un filet de sang frais dégouline. Depuis le premier jour j'avais remarqué cette teinte rouge sombre qui s'était incrustée sur le mur. La teinte décolorée de la peinture bleue, juste au-dessus des bacs, prouvait que l'on brossait soigneusement à cet endroit. Pour l'instant, Farid continue sa besogne. Je reste là, adossé contre la porte pour comprendre. Il passe sa main dans la cage et prend un lapin. Au lieu de le maintenir par la peau du cou, il le prend par les pattes arrière et laisse pendouiller le corps le temps qu'il ne bouge plus, alors, bandant tous ses muscles, il projette avec une violence inouïe le lapin contre le mur dont la tête se fracasse dans un bruit mat. Il le lâche ensuite dans le bac où le corps pris de soubresauts finit sa triste vie de "matériel de laboratoire". Sans aucune gêne à mon égard, il passe au suivant. A chaque fois, une giclée de sang arrose le mur qui, au bout d'une dizaine, devient rouge luisant.
Je m'insurge :
- C'est cruel ce que tu fais là, tu peux pas les euthanasier en douceur ?
- Pour quoi faire ? Ils n'ont même pas le temps de sentir quoi que ce soit, c'est pareil et ça va plus....
Il n'a pas le temps de finir sa phrase que le dernier lapin a réussi à sauter par dessus le bac, ce qui lui arrache un :
- Viens ici, saloperie.
Et d'un geste vif il pose son pied sur l'animal en s'appuyant de tout son poids. Le lapin gît là, dans une flaque de sang, son petit corps secoué par les dernières convulsions, écrasé par ce débile mental. Il n'y a rien à dire ni rien à faire, si ce n'est de lui rentrer dedans, mais c'est un sacré gaillard le Farid qui compense en muscles ce qu'il n'a pas en substance cérébrale. Que faire ?
Je suis pourtant persuadé qu'il y a une méthode moins violente pour euthanasier ces lapins. Peut-être qu'il ne l'applique pas uniquement parce qu'il ne sait rien faire d'autre que de leur éclater la tête contre le mur. Dans ce cas, on doit pouvoir l'obliger à faire différemment. Je monte voir le Dr Robert, mais il n'est pas là, je décide d'aller en parler à la directrice Mme Roïg. Celle-ci me regarde du haut de son mépris raciste, mais peu importe, je tente le coup.
- Madame, c'est inadmissible, Farid tue les lapins en les jetant contre le mur, dites-lui, obligez-le à faire autrement.
- Ecoutez Samir, Farid fait son boulot, alors foutez-lui la paix, ce n'est pas parce que vous êtes le neveu du directeur que vous allez faire votre loi.
Je n'ai même pas le temps de lui répondre que Madame tourne les talons et me laisse perplexe au milieu du couloir avec ma colère. ../..

P206-P207
../.. Ce vendredi matin-là, je redescends du distributeur de boisson avec mon café en attendant que le cycle de l'autoclave se termine. Je feuillette le journal, accoudé contre le gros congélateur qu'ils viennent de mettre dans ma salle lorsque je suis surpris par des vibrations que me transmet mon coude, comme si le moteur venait juste de s'arrêter ou de démarrer. Je n'y prête pas attention. Jusqu'à ce que je ressente de nouveau les vibrations. Puis encore une fois. Il est déjà foutu leur congélateur me dis-je. Mais en fait de vibrations, en mettant ma main à plat sur le capot, je me rends compte que cela ressemblerait plus à des chocs venant de l'intérieur. Non sans appréhension, j'ouvre le capot. Je sens mon sang se glacer d'effroi. Au milieu des sacs poubelle rouges de sang, des organes prélevés et de têtes de gerbilles entreposées là, un chien, ouvert de la gorge au pubis, les intestins encore mus par des mouvements péristaltiques, est secoué par de violents soubresauts, agonise dans le congélateur. Je me sens vraiment mal, devant cette soudaine vision d'horreur. Des larmes de colère et de douleur coulent sur mes joues tandis que je cours aux toilettes pour vomir mon petit-déjeuner. Je ne pense même pas à retourner dans la salle pour refermer le congélateur ni finir mon travail de stérilisation. De rage, je prends les clés de l'animalerie des chiens et je leur ouvre la porte, mais rien n'y fait, les pauvres bêtes ont aussi peur de moi que de n'importe quel autre animalier, avec ma blouse blanche. Je pars en laissant tout ouvert, profondément choqué par ce que je viens de voir. J'envoie le gardien et sa feuille de présence sur les roses et je rentre chez moi. ../..

Livre en ligne

'Victimes Silencieuses' est un ouvrage essentiel sur l'expérimentation animale. C'est un témoignage 'coup de poing', une lecture que l'on n'oublie pas... Il n'a pourtant jamais été republié, et il devenait rare sur le marché de l'occasion, alors pour éviter qu'il ne tombe dans l'oubli, je l'ai mis en ligne.

La tâche ne fut pas simple. Il m'a fallu bien du temps pour le "recopier" (par un procédé biscornu, munie d'un appareil photo et d'un logiciel de conversion). L'autre difficulté fut le grand nombre d'erreurs rencontrées dans ce livre (orthographe, ponctuation). J'ai corrigé une grande partie de ces erreurs, mais il en reste, ne soyez pas surpris si vous en croisez.

Voici donc le fruit de ce long travail, un document au format pdf que vous pouvez lire ici-même (il devrait s'afficher ci-dessous) ou que vous pouvez télécharger sur ce lien. N'hésitez pas à le partager, c'est un livre important, il ne faut pas qu'il disparaisse...



16 février 2016

(Up) Livre en ligne : Des bêtes et des hommes, de J. Allen Boone

Des bêtes et des hommes
de J. Allen Boone
Apprenez à communiquer avec les animaux
et à les comprendre :
ils vous enseigneront le vrai sens de la vie.


Mise à jour : Livre en ligne

Fascinant,
à lire absolument.

Le monde a de plus en plus besoin d'hommes qui comprennent ce que la nature, et les animaux en particulier, essaient de nous dire.

Beaucoup de personnes savent maintenant que les animaux connaissent et perçoivent une foule de choses qui nous échappent parce que, trop souvent, nous nous limitons - par esprit rationnaliste et par un fâcheux et fallacieux sentiment de supériorité - à notre seul intellect.

Anne de Noailles a dit que les bêtes sont de "fraternels et sages compagnons" mais elles ne seront pour nous de véritables amies que lorsque nous ferons l'effort nécessaire pour les comprendre, les considérant comme des "intelligences" à part entière, balayant nos idées préconçues, étriquées et, surtout, notre concept de supériorité. Il faut que nous établissions le dialogue avec nos amis les animaux, en toute bonne foi, l'esprit ouvert et le coeur accueillant; alors seulement ils nous répondront et nous feront faire d'étonnantes découvertes, comme le fit faire à l'auteur de ce livre ce merveilleux chien-acteur d'Hollywood nommé "Coeur-vaillant".

J. Allen Boone, qui fut un homme de coeur au sens le plus noble du terme, et doué d'une grande humilité, vous fera partager ses émouvantes expériences avec beaucoup d'humour et de sensibilité. Il vous montrera comment les animaux communiquent entre eux et avec les humains qui les comprennent et les aiment. Il établit la preuve de l'intelligence des chiens ainsi que de nombreuses autres formes de vie, et vous laissera convaincu du bien-fondé des paroles de Shakespeare : "Il y a plus de choses entre le ciel et la terre que n'en peut concevoir notre philosophie."

Une des clés de cette paix intérieure et de cette joie de vivre que nous recherchons tous se trouve dans la connaissance de l'unité de la création tout entière.

Un livre fascinant, une aventure réelle que chacun est invité à vivre.

Des bêtes et des hommes, J. Allen Boone, Traduction : Mary Sterling, Editions Dangles, 1975, 150 pages (Première édition : Harper and Row, 1954)

Pour en savoir plus

- Le site des Editions Dangles
- L'avis de Felixia
- Requiem pour un nouveau monde, de Maud Fauvel
- L'étonnant pouvoir des animaux, de Gordon Smith
- Les pouvoirs inexpliqués des animaux, de Rupert Sheldrake

L'avis d'un lecteur
Source

Belle leçon d'humanité et d'amour

Un chien ou tout autre animal peut devenir votre guide spirituel...
Difficile à concevoir pour nous, humains pétris d'orgueil et de supériorité. Il suffit de changer nos opinions et idées préconcues sur les autres formes de vie afin d'aborder la communication silencieuse, une "connection magique" et pour prendre soin de nos pensées afin de respecter les autres...
Une belle leçon qui m'a beaucoup touché et qui m'amène à modifier mon comportement, puissions nous être nombreux à suivre ces conseils... merci à J. Allen Boone de nous l'avoir transmise.

Le sommaire

Préface de l'auteur
Préface de Mary Sterling dans l'édition française
1. Météore à quatre pattes
2. Bonhomme Vendredi
3. Faire connaissance
4. Etonnement
5. Tenir compagnie
6. Lecteur des pensées
7. Maître détective
8. En flânant
9. Rat du désert
10. Interview de chien
11. Programme
12. Regarder et voir
13. Globes oculaires
14. Chien des sommets
15. Un chien répond
16. Ponts mentaux
17. Alchimie magique
18. Nudistes
19. Splendeur emprisonnée
20. Serpents à sonnettes
21. Les sonnettes s'agitent
22. Poneys montés à cru
23. Le fil d'or
24. Les Zéphyr
25. Etranges associés
26. Vers de terre
27. Code de fourmis
28. Musca domestica
29. Mrs Grundy
30. Décréter
31. Ardoise nette
32. Mouche, vole !
33. L'affront
34. Gloire du matin



Quelques extraits

Préface

Vivant comme nous le faisons, des jours kaléidoscopiques dans lesquels le désarroi, la méfiance, les conflits et la misère sont partout, il est significatif de noter que de plus en plus de personnes retrouvent l'assurance et la paix de l'esprit auprès d'êtres qui dépassent les frontières humaines. Elles se lient d'amitié, non seulement avec des favoris conventionnels tels que le chien, le cheval, le chat et les oiseaux, mais aussi avec les animaux sauvages, les serpents et les insectes.

Les hommes et les femmes du monde entier prennent conscience, avec acuité, de ce qu'un élément essentiel à la vie et au bien-être se meurt dans l'espèce humaine, menace de disparaître complètement. Cet élément a trait aux valeurs telles que l'amour... le désir... le désintéressement... l'intégrité... la sincérité... la loyauté envers ce que l'on a de meilleur en soi... l'honnêteté... l'enthousiasme... l'humilité... la bonté... le bonheur... la joie. La plupart des animaux possèdent encore abondamment ces avantages et, pour peu qu'on leur en donne l'occasion, aspirent à les partager avec l'homme. ../..

../.. Pouvons-nous, "modernes humains", retrouver ce langage universel apparemment perdu ? Pouvons-nous, par ce moyen, apprendre à vivre en bonne intelligence, non seulement avec les membres de notre propre espèce, mais aussi avec les autres créatures ? Je le crois. Et pour le soutenir j'ai relaté dans les pages qui suivent les histoires vécues d'un grand nombre de rapports inhabituels avec des animaux, des reptiles, des insectes et même des bactéries. Aucune de ces aventures ne fut projetée ou attendue. Elles se manifestèrent selon le déroulement plein de grâce de la vie. Je commence par l'histoire d'un chien, grande vedette de cinéma, qu'on appelait Cœurvaillant (Strongheart).

En lisant ces récits vous verrez que chaque fois que j'ai été suffisamment humble et prêt à permettre à un être qui n'était point humain de m'instruire, ces amis à quatre, à six pattes ou sans pattes du tout, partagèrent avec moi une sagesse sans prix. Ils m'apprirent que la parfaite compréhension et la coopération parfaite entre l'humain et les autres formes de la vie sont certaines lorsque l'humain remplit vraiment la part qui lui revient.

Et ceci a enrichi et élargi ma vie à tel point, m'a ouvert de nouvelles régions, pleines de charme, à explorer, que je me sens obligé de partager au moins un peu de ma joie avec autrui.

J. Allen Boone

Chapitre 16 : Ponts mentaux

II n'est pas facile d'expliquer en termes clairs la technique exacte qui permet d'échanger des idées avec un chien au moyen d'une communication silencieuse. Le premier obstacle à cette compréhension mutuelle est l'attitude généralement adoptée qui s'oppose à tout ce qui n'est pas habituel, particulièrement dans ce qui a trait aux animaux.

Une autre difficulté vient du fait qu'établir des rapports rationnels de cette manière avec un chien doit nécessairement être une aventure de pionnier. On est forcé d'être son propre navigateur mental, de parvenir à ses propres conclusions et d'en faire soi-même la preuve. On est donc contraint d'agir à l'inverse de toutes les notions conventionnelles sur les rapports entre les humains et les bêtes.

Mon handicap le plus grand, lorsque je voulus apprendre à converser avec Cœurvaillant, me vint de l'assortiment de faux concepts dont j'avais hérité, des erreurs accumulées pendant des siècles au sujet des chiens. Et l'une de ces plus arrogantes idées était l'orgueil qui me faisait penser qu'à cause de "ma supériorité" divinement attribuée, j'étais, moi, qualifié pour communiquer de haut certaines idées importantes aux animaux, mais que ceux-ci, à cause de leur "infériorité divinement attribuée", n'étaient capables que de communications de peu de valeur. Et même lorsque de telles communications étaient possibles, elles ne pouvaient être exprimées que grossièrement et d'une façon très limitée, comme il convenait à une "créature muette, fonctionnant sur un plan d'intelligence inférieure".

Cœurvaillant me débarrassa de ces sottises. Pas tout d'un coup, mais jour après jour, tandis que je le suivais, en l'observant attentivement, à travers la campagne et assis, figurativement, à ses pieds, chez moi, lui permettant de m'enseigner des choses que j'avais grand besoin de connaître afin de devenir un meilleur compagnon pour lui, un meilleur citoyen de l'univers aussi. Lorsque je consentis à être instruit par un chien, Cœurvaillant m'impartit une sagesse précieuse, des secrets merveilleux se rapportant à l'art qu'ont les chiens de vivre pleinement et joyeusement dans le présent, sans souci des circonstances.

Il me fit perdre la mauvaise habitude de mépriser les autres entités vivantes, les autres formes de vie, comme m'étant inférieures, limitées ou sans rapport avec moi. Il me fit définitivement comprendre que si je voulais vivre avec lui d'une façon intelligente, il me faudrait faire en sorte que tous mes contacts mentaux avec lui soient aussi élevés, aussi horizontaux et aussi étendus que possible. Il m'apprit que je devrais toujours le considérer comme un semblable inconditionné plutôt que comme "un chien" dans le sens conventionnel et restrictif de ce terme.

De cet enseignement, un pont mental, pour ainsi dire, s'établit entre nous. Ce pont était à double sens, et non point à sens unique. Il s'étendit de là où je paraissais fonctionner en tant qu' "humain" jusque-là où Cœurvaillant semblait exister en tant que "chien". Ce pont invisible nous reliant, il fut possible à mes pensées de le traverser librement pour pénétrer le champ de son penser, et à ses pensées de parvenir aux miennes. A cela, cependant, il y avait une obligation stricte ; il me fallut apprendre à ne laisser traverser dans sa direction que mes pensées les meilleures ; je savais que de son côté il en était de même.

Quand je maintenais mon extrémité du pont assez haute, assez horizontale et assez largement ouverte pour recevoir ou pour émettre, le trafic de la pensée coulait entre nous d'une façon naturelle et de manière à nous entraider. Cœurvaillant ne semblait avoir que rarement de la difficulté à comprendre les pensées que je lui envoyais, qu'il s'agisse de nouvelles, de suggestions, d'opinions, de questions ou d'expressions d'appréciation. Et plus je m'y appliquais, plus il me devenait facile de comprendre ce que silencieusement, il me disait.

Parfois, cependant, j'oubliais le rôle que j'avais à jouer dans notre parenté. J'élevais alors l'extrémité du pont de telle sorte que celui-ci s'abaissait dans sa direction comme d'un supérieur à un inférieur. Lorsque ceci se produisait, l'invisible courant entre nous souffrait d'un court-circuit et, automatiquement, je retombais au niveau relativement bas d'un de ces humains bornés qui essayent de faire l'important dans l'ombre d'un chien intelligent.

Celui qui nous aurait rencontrés, le chien et moi, assis tranquillement côte à côte dans quelque coin pittoresque de la campagne, et auquel on aurait dit très sérieusement que nous étions en train d'échanger, au moyen du langage silencieux, de stimulants points de vue, aurait sans doute eu bien du mal à le croire. Pourtant c'eut été la vérité. Si cet homme avait voulu se joindre à nous, s'il avait consenti à être suffisamment souple et assez réceptif, il aurait partagé avec nous le simple langage universel dont nous nous servions, ce langage qui s'exprime de cœur à cœur ["Le langage est source de malentendus." - Antoine de St-Exupéry] sans qu'il y ait besoin de sons. ../..

Livre en ligne

J'ai eu la chance de pouvoir lire cet ouvrage introuvable (les occasions sont rarissimes et hors de prix). Et c'est une belle surprise : ce petit livre (seulement 150 pages, en format poche) est fascinant. Il est non seulement profondément humain mais c'est aussi un merveilleux petit guide pour s'initier à la télépathie avec les animaux.

Comme le dit si bien Mary Sterling, la traductrice, dans la préface : "Voici un livre qui va vous donner à réfléchir ; un livre qui peut, si vous le voulez, transformer votre vie. Il va vous ouvrir un monde nouveau et merveilleux, vous révéler toute une gamme de valeurs nouvelles, insoupçonnées peut-être et pourtant éternelles."

Qui plus est, J. Allen Boone était un pionnier puisque cet ouvrage, qui semble pourtant si contemporain, a été publié pour la première fois en 1954 (!).

Pour éviter qu'il ne disparaisse totalement du paysage francophone, le voici en ligne. Vous pourrez lire ce pdf ici-même (il devrait s'afficher ci-dessous) ou bien le télécharger sur ce lien. Un document instructif, à partager avec le plus grand nombre.

Un grand merci à Maud, sans qui je n'aurais pu faire cette précieuse lecture.