Vache à lait
Dix mythes de l'industrie laitière
d'Elise Desaulniers
préface de Normand Baillargeon
Dix mythes de l'industrie laitière
d'Elise Desaulniers
préface de Normand Baillargeon
Cet essai dénonciateur met en cause la consommation excessive de lait au Québec.
Il n'est pas surprenant que les Québécois se classent dans le top 10 mondial des grands consommateurs de lait : nous en consommons en moyenne 84 litres par année. Nous avons réellement pris à coeur le slogan "Un verre de lait, c'est bien, mais deux, c'est mieux". Mais à qui profite le second verre de lait ? A nous ou au producteur ?
L'industrie laitière, le secteur d'activité agricole le plus important au Québec, jouit depuis toujours d'une perception positive. Mais la prépondérance du lait dans notre alimentation et notre attachement aux produits laitiers n'auraient rien de naturel ; ils seraient plutôt le résultat de grosses campagnes de communication et de lobbying.
Serions-nous les vaches à lait de l'industrie ? Elise Desaulniers précise, raconte, dénonce. Elle souligne que le lait que nous buvons n'est pas celui que nous pensons boire, et encore moins celui que nous buvions il y a quarante ans. Elle enquête sur la Fédération des producteurs de lait du Québec, s'interroge à propos du Guide alimentaire canadien et du bien-être des vaches laitières et révèle la difficulté pour les jeunes fermiers d'accéder à la production commerciale.
Vache à lait : Dix mythes de l'industrie laitière, Elise Desaulniers, Préface de Normand Baillargeon, Editions Stanké, mars 2013, 200 pages
A propos de l'auteur
Elise Desaulniers, blogueuse et auteur canadienne, a publié en 2011 son premier livre "Je mange avec ma tête" dans lequel cette végétalienne, ex-omnivore, plaide pour que le consommateur oriente ses choix alimentaires en tenant compte des effets sur l'environnement et en fonction du bien-être des animaux. "Vache à lait" est son second ouvrage. Depuis, elle est souvent invitée à parler d’éthique alimentaire devant des groupes de toutes sortes et elle travaille sur de nouveaux projets d’écriture.
Pour en savoir plus
- Le site de l'auteur
- Son blog : Penser avant d’ouvrir la bouche
- Le site des Editions Stanké
- Je mange avec ma tête, d'Elise Desaulniers
- Lait de vache : Blancheur trompeuse, d'Anne Laroche-Walter
- Lait, mensonges et propagande, de Thierry Souccar
- Le lait pas si blanc, de Chantal et Lionel Clergeaud
- Vivons sans lait pour vivre mieux, de Natacha Duhaut et Béatrice Thibault
- Le Rapport Campbell, de Colin et Thomas Campbell
On marchait sur le boulevard St-Laurent, Emilie et moi. C’était l’automne. Le soleil nous chauffait encore le visage et j’avais détaché mon manteau, comme pour attraper chacune des dernières molécules d’été avant de plonger dans l’hiver. Depuis quelques mois, j’avais découvert les questions d’éthique alimentaires. J’étais devenue végétarienne et les boîtes Amazon s’accumulaient dans mon salon : je lisais tout ce que je pouvais trouver sur le sujet. Emilie aussi était végétarienne. Et même végétalienne. Chez elle, pas de longues lectures. Simplement l’intuition que la souffrance occasionnée aux animaux est injustifiable. Par la force des choses, j’étais devenue l’encyclopédie d’Emilie. Et nos marches sur St-Laurent étaient une façon de lui filer mes connaissances en profitant de ses conseils de végé avertie lorsqu’on rentrait dans une épicerie.
Une question d’Emilie, toute banale, allait ébranler un grand pan de mes convictions : "Paraît que les vaches, elles ne produisent pas naturellement du lait. Elles le font parce qu’on les force à le faire. Tu es au courant ?" A vrai dire, je n’en avais aucune idée. Soit que je n’avais rien lu sur la question, soit que j’avais écarté de mes lectures tout ce qui touchait le lait, un sujet qui me semblait bien secondaire par rapport au traitement des poules et des cochons. On a commencé à en discuter et il fallait bien se rendre à l’évidence : pourquoi les vaches seraient-elles différentes des autres mammifères ? Pour donner du lait, il fallait qu’elles donnent des veaux. Et que faisait-on des vaches vieillissantes ? De la viande ? On se questionnait. En même temps que le soleil tombait, mon petit monde de végétarienne s’effondrait. Le lait et la viande étaient-ils vraiment différents ?
J’ai poursuivi mes lectures. J’ai constaté assez rapidement que, du point de vue de l’éthique animale et environnementale, troquer la viande pour du fromage ne faisait pas vraiment de sens. J’ai aussi vite compris que les belles pubs du lait n’étaient… que des pubs. Au même titre que les pubs de char qui font tout pour nous convaincre d’adopter la traction intégrale, les pubs de lait nous le présentent comme un aliment essentiel. Or, les trois quart de l’humanité n’en boivent pas (ils n’ont pas l’enzyme nécessaire à sa bonne digestion) et ils ne s’en portent pas plus mal.
Ce sont ces mythes, les fausses croyances qu’on entretient par rapport au lait que j’ai voulu explorer dans mon dernier livre "Vache à lait". Dans toutes les entrevues que j’ai données à ce sujet, on m’a dit que je m’attaquais à une vache sacrée. Peut-être bien, mais à quoi bon écrire si ce n’est pas pour bousculer les idées reçues. Et pourquoi les produits laitiers seraient-ils plus sacrés que les choux ou les pommes de terre ?
"Vache à lait" n’est pas un manuel de propagande anti-lait. Où serait l’intérêt de répondre à la propagande par de la propagande ? Je n’ai personnellement rien à gagner à ce que les gens consomment moins de lait. Dans mon livre, j’ai plutôt essayé d’offrir une contre-histoire, de montrer l’envers des mythes véhiculés par l’industrie. Non, le lait n’est pas poison. Mais il n’est pas non plus l’aliment miracle qu’on nous vend. Selon de nombreuses études, sa consommation serait liée à un nombre étonnant de problèmes de santé. Par ailleurs, et malgré les images réconfortantes qui ornent les cartons, la production de lait ne se fait pas sans souffrance : la plupart des vaches passent leur vie attachées sans voir la lumière du soleil et elles sont séparées de leurs veaux à la naissance. Ensuite, après quatre ou cinq ans de service, elles finissent toutes en viande à burger. Quant à l’industrie laitière canadienne, elle émet annuellement plus de CO2 que l’ensemble de l’industrie aérienne ou minière. Voilà beaucoup de conséquences indésirables pour un aliment qui n’est pas essentiel.
Ecrire un tel livre aurait été un peu vain si je m’étais contentée d’aligner les problèmes sans proposer de solution. C’est pourquoi, à la fin du livre, j’ai demandé à une diététiste de m’aider à faire la liste des alternatives aux produits laitiers. J’espère que le lecteur prendra plaisir à les découvrir. A son rythme. Comme lorsqu’on discute avec une amie en se baladant sur St-Laurent.
"Pour qu’une vache donne du lait, cela nécessite au préalable la naissance d’un veau. La gestation dure 9 mois et à l’état naturel, une vache allaite son petit de 6 à 9 mois avant de retomber enceinte. Mais de nos jours, les vaches laitières continuent de produire du lait alors qu’elles sont en gestation. En fait, les vaches “modernes” sont en lactation 305 jours par année, soit durant à peu près toute leur grossesse. 80% du lait produit provient de vaches enceintes. Voilà pourquoi il contient une importante concentration d’hormones de grossesse : les oestrogènes et la progestérone" p.53-54
La présence du lait dans les écoles nous semble normale : on a grandi avec elle. Mais quand on y regarde de plus près, il faut se rendre à l’évidence : on est plus au début du siècle dernier alors qu’il fallait engraisser les enfants avec ce qu’on avait sous la main. Or, bien que nos besoins et connaissances ont évolué, les pratiques des producteurs sont restées les mêmes. (…) Pire : on promeut le lait au chocolat [qui contient autant de sucre que les boissons gazeuses]. Il faut vraiment croire aux propriétés miraculeuses du lait pour consommer un aliment qui est une source aussi importante de sucre. p.87-88
Maintenant qu’on sait que le lait n’est pas la meilleure source de calcium, il ne reste plus que l’appel à l’habitude, aux émotions et les images léchées pour nous convaincre de boire du lait. p.93
Après tout, la plupart des gens sont d’accord pour dire que le sang ou les organes humains ne devraient pas pouvoir être vendus ni achetés, car ce ne sont pas des marchandises. Je ne sais pas si le lait devrait se classer dans cette catégorie. Mais je sais que faire commerce à partir d’une exploitation massive d’êtres sensibles, conscients et non consentants, ne pourra jamais être une industrie comme les autres. p.142
Il n'est pas surprenant que les Québécois se classent dans le top 10 mondial des grands consommateurs de lait : nous en consommons en moyenne 84 litres par année. Nous avons réellement pris à coeur le slogan "Un verre de lait, c'est bien, mais deux, c'est mieux". Mais à qui profite le second verre de lait ? A nous ou au producteur ?
L'industrie laitière, le secteur d'activité agricole le plus important au Québec, jouit depuis toujours d'une perception positive. Mais la prépondérance du lait dans notre alimentation et notre attachement aux produits laitiers n'auraient rien de naturel ; ils seraient plutôt le résultat de grosses campagnes de communication et de lobbying.
Serions-nous les vaches à lait de l'industrie ? Elise Desaulniers précise, raconte, dénonce. Elle souligne que le lait que nous buvons n'est pas celui que nous pensons boire, et encore moins celui que nous buvions il y a quarante ans. Elle enquête sur la Fédération des producteurs de lait du Québec, s'interroge à propos du Guide alimentaire canadien et du bien-être des vaches laitières et révèle la difficulté pour les jeunes fermiers d'accéder à la production commerciale.
Vache à lait : Dix mythes de l'industrie laitière, Elise Desaulniers, Préface de Normand Baillargeon, Editions Stanké, mars 2013, 200 pages
A propos de l'auteur
Elise Desaulniers, blogueuse et auteur canadienne, a publié en 2011 son premier livre "Je mange avec ma tête" dans lequel cette végétalienne, ex-omnivore, plaide pour que le consommateur oriente ses choix alimentaires en tenant compte des effets sur l'environnement et en fonction du bien-être des animaux. "Vache à lait" est son second ouvrage. Depuis, elle est souvent invitée à parler d’éthique alimentaire devant des groupes de toutes sortes et elle travaille sur de nouveaux projets d’écriture.
Pour en savoir plus
- Le site de l'auteur
- Son blog : Penser avant d’ouvrir la bouche
- Le site des Editions Stanké
- Je mange avec ma tête, d'Elise Desaulniers
- Lait de vache : Blancheur trompeuse, d'Anne Laroche-Walter
- Lait, mensonges et propagande, de Thierry Souccar
- Le lait pas si blanc, de Chantal et Lionel Clergeaud
- Vivons sans lait pour vivre mieux, de Natacha Duhaut et Béatrice Thibault
- Le Rapport Campbell, de Colin et Thomas Campbell
Pourquoi j’ai écrit sur le lait ?
par Elise Desaulniers
On marchait sur le boulevard St-Laurent, Emilie et moi. C’était l’automne. Le soleil nous chauffait encore le visage et j’avais détaché mon manteau, comme pour attraper chacune des dernières molécules d’été avant de plonger dans l’hiver. Depuis quelques mois, j’avais découvert les questions d’éthique alimentaires. J’étais devenue végétarienne et les boîtes Amazon s’accumulaient dans mon salon : je lisais tout ce que je pouvais trouver sur le sujet. Emilie aussi était végétarienne. Et même végétalienne. Chez elle, pas de longues lectures. Simplement l’intuition que la souffrance occasionnée aux animaux est injustifiable. Par la force des choses, j’étais devenue l’encyclopédie d’Emilie. Et nos marches sur St-Laurent étaient une façon de lui filer mes connaissances en profitant de ses conseils de végé avertie lorsqu’on rentrait dans une épicerie.
Une question d’Emilie, toute banale, allait ébranler un grand pan de mes convictions : "Paraît que les vaches, elles ne produisent pas naturellement du lait. Elles le font parce qu’on les force à le faire. Tu es au courant ?" A vrai dire, je n’en avais aucune idée. Soit que je n’avais rien lu sur la question, soit que j’avais écarté de mes lectures tout ce qui touchait le lait, un sujet qui me semblait bien secondaire par rapport au traitement des poules et des cochons. On a commencé à en discuter et il fallait bien se rendre à l’évidence : pourquoi les vaches seraient-elles différentes des autres mammifères ? Pour donner du lait, il fallait qu’elles donnent des veaux. Et que faisait-on des vaches vieillissantes ? De la viande ? On se questionnait. En même temps que le soleil tombait, mon petit monde de végétarienne s’effondrait. Le lait et la viande étaient-ils vraiment différents ?
Une vache sacrée
J’ai poursuivi mes lectures. J’ai constaté assez rapidement que, du point de vue de l’éthique animale et environnementale, troquer la viande pour du fromage ne faisait pas vraiment de sens. J’ai aussi vite compris que les belles pubs du lait n’étaient… que des pubs. Au même titre que les pubs de char qui font tout pour nous convaincre d’adopter la traction intégrale, les pubs de lait nous le présentent comme un aliment essentiel. Or, les trois quart de l’humanité n’en boivent pas (ils n’ont pas l’enzyme nécessaire à sa bonne digestion) et ils ne s’en portent pas plus mal.
Ce sont ces mythes, les fausses croyances qu’on entretient par rapport au lait que j’ai voulu explorer dans mon dernier livre "Vache à lait". Dans toutes les entrevues que j’ai données à ce sujet, on m’a dit que je m’attaquais à une vache sacrée. Peut-être bien, mais à quoi bon écrire si ce n’est pas pour bousculer les idées reçues. Et pourquoi les produits laitiers seraient-ils plus sacrés que les choux ou les pommes de terre ?
"Vache à lait" n’est pas un manuel de propagande anti-lait. Où serait l’intérêt de répondre à la propagande par de la propagande ? Je n’ai personnellement rien à gagner à ce que les gens consomment moins de lait. Dans mon livre, j’ai plutôt essayé d’offrir une contre-histoire, de montrer l’envers des mythes véhiculés par l’industrie. Non, le lait n’est pas poison. Mais il n’est pas non plus l’aliment miracle qu’on nous vend. Selon de nombreuses études, sa consommation serait liée à un nombre étonnant de problèmes de santé. Par ailleurs, et malgré les images réconfortantes qui ornent les cartons, la production de lait ne se fait pas sans souffrance : la plupart des vaches passent leur vie attachées sans voir la lumière du soleil et elles sont séparées de leurs veaux à la naissance. Ensuite, après quatre ou cinq ans de service, elles finissent toutes en viande à burger. Quant à l’industrie laitière canadienne, elle émet annuellement plus de CO2 que l’ensemble de l’industrie aérienne ou minière. Voilà beaucoup de conséquences indésirables pour un aliment qui n’est pas essentiel.
Ecrire un tel livre aurait été un peu vain si je m’étais contentée d’aligner les problèmes sans proposer de solution. C’est pourquoi, à la fin du livre, j’ai demandé à une diététiste de m’aider à faire la liste des alternatives aux produits laitiers. J’espère que le lecteur prendra plaisir à les découvrir. A son rythme. Comme lorsqu’on discute avec une amie en se baladant sur St-Laurent.
Quelques extraits
"Pour qu’une vache donne du lait, cela nécessite au préalable la naissance d’un veau. La gestation dure 9 mois et à l’état naturel, une vache allaite son petit de 6 à 9 mois avant de retomber enceinte. Mais de nos jours, les vaches laitières continuent de produire du lait alors qu’elles sont en gestation. En fait, les vaches “modernes” sont en lactation 305 jours par année, soit durant à peu près toute leur grossesse. 80% du lait produit provient de vaches enceintes. Voilà pourquoi il contient une importante concentration d’hormones de grossesse : les oestrogènes et la progestérone" p.53-54
La présence du lait dans les écoles nous semble normale : on a grandi avec elle. Mais quand on y regarde de plus près, il faut se rendre à l’évidence : on est plus au début du siècle dernier alors qu’il fallait engraisser les enfants avec ce qu’on avait sous la main. Or, bien que nos besoins et connaissances ont évolué, les pratiques des producteurs sont restées les mêmes. (…) Pire : on promeut le lait au chocolat [qui contient autant de sucre que les boissons gazeuses]. Il faut vraiment croire aux propriétés miraculeuses du lait pour consommer un aliment qui est une source aussi importante de sucre. p.87-88
Maintenant qu’on sait que le lait n’est pas la meilleure source de calcium, il ne reste plus que l’appel à l’habitude, aux émotions et les images léchées pour nous convaincre de boire du lait. p.93
Après tout, la plupart des gens sont d’accord pour dire que le sang ou les organes humains ne devraient pas pouvoir être vendus ni achetés, car ce ne sont pas des marchandises. Je ne sais pas si le lait devrait se classer dans cette catégorie. Mais je sais que faire commerce à partir d’une exploitation massive d’êtres sensibles, conscients et non consentants, ne pourra jamais être une industrie comme les autres. p.142
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